Le 10 mars 2025, une délégation de haut niveau en provenance de Biélorussie, dirigée par le vice-premier ministre Viktor Karankevich, a conclu une visite de deux jours à Benghazi, dans l’est de la Libye. Cette mission a permis la signature de six accords-cadres dans des secteurs clés tels que la santé, l’agriculture, l’industrie et l’énergie, notamment l’exploitation pétrolière. Ces accords, conclus avec le gouvernement d’Oussama Hamad, visent à renforcer la coopération entre les deux pays, dans le but de diversifier et de solidifier leurs liens économiques et stratégiques.
Les négociations menées à Benghazi ont permis de sceller des contrats importants dans l’industrie pétrolière, notamment pour l’exploration du gaz et du pétrole dans les régions de l’est et du sud de la Libye. Cette avancée survient quelques jours après l’annonce du gouvernement de Tripoli d’ouvrir ses appels d’offres aux entreprises étrangères. La signature de ces accords met en évidence l’intention des autorités de l’est libyen de diversifier leurs partenariats économiques, tout en cherchant à contourner l’isolement diplomatique auquel elles font face sur la scène internationale.
Cette visite intervient dans un contexte de forte polarisation politique en Libye, où les autorités de Benghazi, dirigées par le maréchal Khalifa Haftar, cherchent à élargir leur réseau de soutiens à l’international. La Libye est en proie à une guerre civile depuis 2011, et les autorités de l’est du pays, représentées par le gouvernement d’Oussama Hamad, sont en opposition avec le gouvernement d’union nationale basé à Tripoli, dirigé par Abdelhamid Dbeibah. Ce rapprochement avec Minsk s’inscrit dans une volonté de contrebalancer l’influence du gouvernement de Tripoli, notamment en s’alliant à des pays non alignés avec Dbeibah.
L’un des aspects les plus notables de cette visite est la présence discrète du chef des services de renseignement biélorusse, qui soulève des interrogations sur l’extension de la coopération au-delà des seuls domaines économiques. Selon des observateurs, cette mission pourrait également inclure des discussions sur des questions de sécurité et de défense, en particulier après les accords militaires signés lors de la visite de Khalifa Haftar à Minsk en février 2025. Des accords auraient été conclus pour la formation des forces armées libyennes, renforçant ainsi les liens militaires entre les deux nations.
Les analystes libyens pointent également l’influence de la Russie dans ce rapprochement. Moscou, qui cherche à accroître sa présence en Afrique, notamment à travers la Libye, pourrait utiliser la Biélorussie comme un levier pour ses intérêts dans la région. La visite de la délégation biélorusse coïncide avec celle du vice-ministre russe de la Défense, Iounous-bek Evkourov, à Benghazi, ce qui suggère une coordination étroite entre Moscou et Minsk. Cette dynamique pourrait avoir des implications géopolitiques importantes, notamment dans le contexte de l’isolement croissant du gouvernement de Tripoli.
Ce rapprochement stratégique intervient alors que la Libye demeure un terrain de jeu pour les puissances étrangères, chacune cherchant à renforcer son influence. Pour Benghazi, ces nouveaux accords représentent une opportunité de sortir de son isolement, mais également un moyen de s’assurer des soutiens militaires et économiques cruciaux face aux défis internes et externes. Cependant, la question de l’impact à long terme sur la stabilité de la Libye et de la région demeure ouverte, d’autant plus que l’équilibre des forces pourrait encore évoluer dans les mois à venir.