Thomas Lubanga, ancien chef de milice et condamné par la Cour pénale internationale pour l’enrôlement d’enfants soldats, refait surface sur la scène politique et militaire. Après avoir purgé une peine de 14 ans de prison et été libéré en 2020, il annonce la création d’un nouveau mouvement politico-militaire : la Convention pour la Révolution Populaire (CRP). Installé en Ouganda depuis plusieurs mois, Lubanga a officialisé ce lancement depuis la cité de Berunda, à 180 km au nord de Bunia, le dimanche 24 mars 2025.
La CRP, qui se revendique comme un acteur politique et militaire, s’est formée dans un contexte de tensions croissantes dans l’est de la République Démocratique du Congo. Depuis sept mois, Lubanga a mené une série de consultations, cherchant à structurer son mouvement avant de le rendre public. La zone de Berunda, principalement minière et agricole, a été choisie comme fief stratégique pour ce lancement, une région marquée par une forte activité militaire et des conflits récurrents. La proximité de la frontière ougandaise renforce également les enjeux géopolitiques de cette initiative. Selon les informations officielles, la CRP possède une branche armée dirigée par le colonel Justin Lobho Zissy, un ancien membre des FARDC ayant fait défection.
Le lancement de ce mouvement intervient dans un contexte de violences persistantes dans l’est de la RDC. En septembre 2024, l’armée congolaise avait annoncé avoir détruit un camp d’entraînement de miliciens dans cette même zone. La région, où l’exploitation minière et l’élevage de bétail cohabitent avec des conflits armés, demeure un lieu stratégique pour les groupes armés. L’annonce de la création de la CRP par Lubanga soulève des inquiétudes sur la consolidation de groupes armés dans cette zone instable. À cela s’ajoutent des rumeurs de rapprochement avec d’autres factions, bien que Lubanga ait formellement rejeté ces allégations.
La question qui se pose désormais est celle des intentions politiques de Lubanga avec la création de la CRP. Bien qu’il ait nié toute volonté d’intégrer le gouvernement d’union nationale mis en place par le président Félix Tshisekedi, son mouvement semble disposer d’une certaine influence militaire, renforcée par le rôle de son chef d’état-major. L’avenir de la CRP pourrait être marqué par un durcissement de la lutte pour le contrôle des zones minières et des ressources naturelles de l’est de la RDC, où plusieurs groupes armés se disputent des territoires stratégiques.
L’un des aspects les plus controversés de cette annonce concerne les accusations de manipulation politique. Bien que Lubanga ait formellement rejeté toute association avec l’AFC/M23, la communauté internationale et les observateurs congolais n’écartent pas la possibilité que son mouvement soit perçu comme une tentative d’influencer la dynamique politique en RDC. La question de ses liens avec des groupes comme le M23, dont le rôle dans le processus de paix reste complexe, continue d’alimenter les spéculations.
La situation en RDC, particulièrement dans l’est du pays, demeure préoccupante. La montée en puissance de nouveaux acteurs comme la CRP, avec des ambitions militaires et politiques, pourrait exacerber les tensions locales. D’autant plus que cette zone, proche de la frontière ougandaise, est une région où les intérêts géopolitiques se croisent, avec des soutiens régionaux souvent flous. Lubanga, en se positionnant sur ce terrain, pourrait non seulement relancer le débat sur la gestion des groupes armés en RDC, mais aussi influencer l’avenir de la politique congolaise, déjà marquée par des luttes internes complexes.