Au Burkina Faso, la chaîne privée BF1 fait face à une amende de 500 000 FCFA, et un de ses journalistes est suspendu de toute activité audiovisuelle pour une durée de deux semaines. Cette décision a été rendue publique par le Conseil supérieur de la communication (CSC), suite à un reportage diffusé sur le congrès extraordinaire de l’Association des journalistes du Burkina (AJB). Le contenu du reportage a été jugé comme portant atteinte à l’image de certains médias publics et des autorités burkinabè.
Le reportage en question reprenait des propos tenus par le président de l’AJB, Guézouma Sanogo, qui dénonçait les atteintes à la liberté de la presse au Burkina Faso. Selon Sanogo, certains médias publics, tels que la Radiodiffusion Télévision du Burkina (RTB) et l’Agence d’Information du Burkina (AIB), seraient utilisés à des fins de propagande. Le Conseil supérieur de la communication a estimé que ces propos étaient non seulement injurieux et diffamatoires à l’égard des autorités et de ces médias publics, mais aussi constitutifs de désinformation, en raison des « allégations infondées » qu’ils contenaient.
Cette sanction s’inscrit dans un contexte particulièrement sensible pour la liberté de la presse au Burkina Faso. Depuis le renversement de l’ancien président Blaise Compaoré en 2014, suivi des événements qui ont conduit à la chute de plusieurs régimes militaires et politiques, la presse burkinabè traverse des périodes d’instabilité. La question des médias publics et de leur rôle dans la gestion de l’information est au cœur des débats. Les accusations de propagande émanant de figures comme Guézouma Sanogo font écho à une tension croissante entre l’État et les journalistes, un sujet qui reste délicat dans un pays où la presse a longtemps été sous pression.
La décision du CSC de sanctionner BF1 et le journaliste soulève des questions sur l’avenir de la liberté d’expression au Burkina Faso. D’un côté, certains y voient un rappel nécessaire à l’ordre dans un environnement où la régulation des médias est parfois jugée insuffisante. De l’autre, cette sanction alimente les préoccupations concernant la limitation de l’espace pour la critique et l’expression libre, notamment en ce qui concerne les médias publics. Le cas de BF1 pourrait marquer le début d’une série de contrôles plus stricts de la part des autorités burkinabè sur les médias critiques.
Dans un communiqué, la direction de BF1 a présenté des excuses formelles à la RTB, à l’AIB, et aux autorités burkinabè. Elle a exprimé son regret pour l’impact négatif du reportage sur l’image de ces institutions et a précisé avoir retiré le reportage incriminé de ses canaux de diffusion. Cette réaction montre la volonté de la chaîne de se conformer aux exigences des régulateurs, tout en évitant une escalade des tensions. Cependant, ces excuses ne font pas disparaître les questions sur l’autocensure et l’indépendance des médias au Burkina Faso.
Cette affaire pourrait avoir des répercussions importantes sur la relation entre les médias privés et les autorités burkinabè dans les mois à venir. Le Conseil supérieur de la communication semble déterminé à renforcer sa régulation et à sanctionner les médias qui s’écartent des lignes directrices qu’il impose. Si cette décision est perçue comme un avertissement, elle pourrait aussi dissuader d’autres médias de s’exprimer librement sur des sujets sensibles. Dans un tel climat, le rôle de la presse indépendante, pourtant essentiel à une démocratie, pourrait être de plus en plus menacé.