Depuis début avril, les autorités tunisiennes ont lancé une vaste opération pour démanteler les camps de migrants installés dans les champs d’oliviers de l’Est du pays. Ces camps, notamment celui du « kilomètre 23 » à Sfax, abritaient entre 20 000 et 30 000 personnes. En réponse à cette situation, la Garde nationale a accepté l’accompagnement des médias pour suivre l’opération, dévoilant ainsi la réalité sur le terrain.
Le camp du « kilomètre 23 », situé entre El-Amra et Jbeniana, était l’un des plus importants, accueillant jusqu’à 2 500 migrants. Ce camp a été démantelé sous pression des propriétaires d’oliveraies de la région, dont plus de 40 ont réclamé l’évacuation du site. En plus des plaintes liées à l’utilisation des terres agricoles, la Garde nationale invoque également des préoccupations sanitaires. Les migrants vivaient dans des conditions déplorables, avec une forte présence de femmes enceintes et d’enfants. Houssem Jebabli, porte-parole de la Garde nationale, a ainsi justifié cette action en insistant sur la nécessité de préserver la santé publique.
Malgré l’ordre de quitter les lieux dans les 48 heures, les migrants ne savent pas où se rendre. Les autorités n’ont pas désigné de nouveaux camps ou lieux d’accueil pour ces personnes vulnérables. Dans un témoignage recueilli sur place, Mac, un migrant guinéen, explique : « Quand tu veux rejoindre un autre camp, on ne t’accepte pas : chacun refuse d’accepter son prochain. » Cette situation témoigne de la précarité et de l’isolement dans lequel se trouvent ces populations, déjà fragilisées par leur parcours migratoire.
Face à ce vide d’options, la Garde nationale indique que les migrants peuvent choisir un retour volontaire vers leur pays d’origine, une démarche facilitée par l’Organisation internationale pour les migrations (OIM). Toutefois, ce choix semble être un dernier recours, d’autant que depuis le début de l’année, seulement 2 300 migrants ont opté pour cette solution. L’absence de structures d’accueil alternatives et le manque de soutien institutionnel rendent cette option difficile à envisager pour beaucoup.
L’opération de démantèlement du camp du « kilomètre 23 » s’inscrit dans un contexte de crise migratoire croissante en Tunisie, un pays pris entre les pressions des migrants cherchant à traverser vers l’Europe et les tensions internes liées à l’accueil de ces populations. Le rôle des autorités tunisiennes est contesté, notamment en raison du manque de solutions concrètes pour ces migrants. Tandis que des organisations comme le Croissant Rouge tunisien et la protection civile participent à l’opération, la solidarité entre les populations locales et les migrants reste limitée, exacerbée par un sentiment de rejet.
L’avenir de ces migrants reste incertain. Si les autorités tunisiennes souhaitent mettre en place une gestion plus rigoureuse de la migration, la question de l’accueil et de l’intégration des migrants se pose de manière cruciale. Le rôle de la communauté internationale, notamment à travers des actions coordonnées avec l’OIM et d’autres agences humanitaires, pourrait s’avérer déterminant dans la recherche de solutions durables à cette crise.