Le lundi 5 mai, à Accra, capitale du Ghana, des milliers de personnes se sont rassemblées pour protester contre la suspension de la présidente de la Cour suprême, Gertrude Araba Esaaba Torkornoo. Organisée par quatre partis d’opposition, cette manifestation a vivement critiqué la décision prise par le président John Dramani Mahama en avril 2025, dans le cadre d’une enquête qui pourrait aboutir à sa destitution. Les leaders de l’opposition, notamment Alexander Afenyo-Markin, ont qualifié cette suspension de manœuvre autoritaire déguisée en processus démocratique.
Alexander Afenyo-Markin, chef de l’opposition parlementaire, a dénoncé ce qu’il considère comme une violation flagrante de la séparation des pouvoirs. Selon lui, le président Mahama cherche à établir un contrôle total sur le système judiciaire, un développement qui, selon l’opposition, pourrait faciliter sa candidature à un troisième mandat en 2028. Il a accusé le président de gouverner non pas démocratiquement, mais par des pratiques tyranniques visant à manipuler les institutions de l’État. “Il ne vise pas la justice, mais à envoyer un message aux juges : obéissez, ou soyez brisés !” a-t-il lancé devant la foule de manifestants.
La suspension de la présidente de la Cour suprême n’est pas un événement isolé dans le cadre de la constitution ghanéenne. En effet, la procédure est prévue par la loi, mais la forme sous laquelle elle a été mise en place suscite des débats. Justin Kodua Frimpong, secrétaire général du Nouveau Parti Patriotique (NPP), a dénoncé la procédure comme étant dénuée de fondement légal solide. Pour lui, le président Mahama s’est appuyé sur des “pétitions frivoles, illégitimes et poreuses” pour justifier la suspension. Frimpong a insisté sur le fait que la Constitution devrait être utilisée avec discernement et conscience, ce qui, selon lui, n’est pas le cas ici.
Cette situation intervient dans un climat politique déjà tendu, où les critiques à l’égard de la gestion du pays par le président Mahama se multiplient. L’opposition, bien qu’unie dans cette contestation, ne cache pas ses inquiétudes quant à la manipulation possible des institutions judiciaires pour des fins politiques. En arrière-plan, les tensions liées à la réélection de Mahama en 2024, et la question de sa possible candidature en 2028, exacerbent les divisions politiques au Ghana.
La situation pourrait évoluer vers un affrontement institutionnel si la pression populaire continue de croître. Les partis d’opposition, soutenus par une partie importante de la population, exigent non seulement la réintégration immédiate de la présidente de la Cour suprême, mais aussi l’arrêt de l’enquête qui la vise. Si cette crise ne trouve pas de solution rapide, elle pourrait marquer un tournant dans la relation entre l’exécutif et le judiciaire au Ghana, avec des implications pour la stabilité politique et juridique du pays.
Dans les rues d’Accra, la mobilisation semble ne pas faiblir. Les manifestants, principalement des partisans des partis d’opposition, appellent à une révision de la procédure, qu’ils jugent inconstitutionnelle. Cette contestation populaire pourrait bien prendre de l’ampleur, d’autant plus que de nombreux Ghanéens se sentent de plus en plus inquiets d’une centralisation du pouvoir exécutif au détriment de l’indépendance judiciaire. Les jours à venir s’annoncent cruciaux pour la politique ghanéenne, avec la perspective d’un affrontement juridique et politique entre les différentes institutions du pays.