À trois mois de l’élection présidentielle en Côte d’Ivoire, l’opposition tente de reprendre l’initiative. Le 16 juillet, deux événements distincts ont mis en lumière les efforts de mobilisation : d’un côté, le PPA-CI et le PDCI ont officialisé les structures de leur front commun, de l’autre, la coalition CAP-CI a engagé un premier contact avec le RHDP, parti au pouvoir. Deux démarches différentes, mais toutes deux motivées par une même exigence : un scrutin crédible et ouvert.
Le Parti des peuples africains – Côte d’Ivoire (PPA-CI), dirigé par Laurent Gbagbo, et le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI-RDA) de Tidjane Thiam, affichent désormais une alliance resserrée. Ensemble, ils réclament une réforme en profondeur de la Commission électorale indépendante (CEI), l’ouverture d’un dialogue politique formel, et surtout, la réintégration de plusieurs figures de l’opposition actuellement écartées du processus électoral. « Ce front n’est pas né pour faire de la figuration », a insisté Sébastien Danon Djédjé, président exécutif du PPA-CI, tout en soulignant la volonté du groupe de rester dans le cadre légal.
Depuis les élections de 2020, qui ont été marquées par des violences et des contestations, la confiance entre l’opposition et le pouvoir reste fragile. Les exclusions de candidats, les accusations de manipulation de la CEI, et l’absence de garanties sur la transparence du scrutin alimentent les tensions. Si le pouvoir tente de rassurer en parlant d’un processus « inclusif », de nombreux acteurs politiques continuent de dénoncer une fermeture du jeu démocratique, voire une instrumentalisation des institutions.
Pendant que le front PPA-CI–PDCI durcit sa position, la CAP-CI, coalition d’opposition plus large, choisit d’ouvrir un canal de discussion avec le RHDP. La rencontre, qui s’est tenue au siège du MGC en présence d’une délégation conduite par Ibrahima Cissé Bacongo, s’est voulue symbolique mais limitée. Simone Gbagbo, porte-parole de CAP-CI, a reconnu que les échanges sont restés superficiels et que les vrais sujets, notamment la réforme du système électoral, n’ont pas encore été abordés en profondeur. L’absence remarquée du PDCI et du FPI, pourtant membres de CAP-CI, révèle les divisions persistantes sur la stratégie à adopter face au pouvoir.
Derrière la rhétorique légaliste affichée, certains cadres de l’opposition laissent entendre qu’une mobilisation populaire reste envisageable si leurs revendications ne sont pas prises en compte. L’appel à la rue, même contenu dans les limites de la légalité, constitue un levier de pression que le pouvoir redoute à l’approche du scrutin. Les événements de 2020 ont laissé des traces, et personne ne souhaite ouvertement une répétition de ces violences. Mais l’impasse politique actuelle fait peser une incertitude lourde sur le climat électoral.
La double posture adoptée ce 16 juillet — unité revendiquée d’un côté, ouverture au dialogue de l’autre — souligne aussi les tensions internes à l’opposition. Tandis que certains misent sur le rapport de force, d’autres semblent encore croire à une issue négociée. Cette divergence stratégique pourrait fragiliser l’élan collectif si elle n’est pas rapidement tranchée. Le véritable enjeu, pour les forces opposées au RHDP, reste de parvenir à imposer un minimum de règles du jeu partagées avant le jour du vote. Faute de quoi, la contestation post-électorale semble déjà en germe.