Un ressortissant libyen, Khaled El Hishri, soupçonné de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre commis entre 2015 et 2020, a été arrêté mercredi 16 juillet à l’aéroport de Berlin. Cet ancien responsable de la prison de Mitiga, à Tripoli, est visé par un mandat d’arrêt de la Cour pénale internationale (CPI) émis le 10 juillet. Il est désormais sous la garde des autorités allemandes dans l’attente de son éventuel transfert à La Haye.
Selon les autorités judiciaires allemandes, El Hishri est accusé d’avoir joué un rôle central dans des actes de torture, de meurtres, de viols et d’agressions sexuelles au sein de la prison de Mitiga, un centre de détention tristement célèbre contrôlé par des milices proches du pouvoir à Tripoli. L’homme aurait non seulement participé directement à ces exactions, mais en aurait également ordonné ou supervisé l’exécution. Il a été arrêté alors qu’il tentait de quitter le pays en direction de Tunis.
La prison de Mitiga, initialement une base aérienne reconvertie, est devenue depuis 2011 un symbole des dérives sécuritaires en Libye. Des ONG et des rapports onusiens y dénoncent depuis des années un usage systématique de la torture, des détentions arbitraires et des abus sexuels, le tout dans un climat d’impunité favorisé par l’effondrement de l’État libyen. Plusieurs hauts responsables libyens liés à cette prison ont été mentionnés dans des enquêtes de la CPI, sans poursuites effectives jusqu’ici.
Cette arrestation intervient dans un contexte de coopération renforcée entre la Libye et la CPI. En mai dernier, le Gouvernement d’unité nationale (GUN), basé à Tripoli, a officiellement reconnu l’autorité de la Cour sur les crimes commis depuis la chute de Kadhafi. Le procureur de la CPI, Karim Khan, a récemment exhorté la justice libyenne à livrer d’autres suspects, dont Osama Almasri Najim, un ancien chef de la police judiciaire également lié à Mitiga, que l’Italie avait brièvement arrêté en début d’année avant de le relâcher et de l’expulser.
Cette affaire souligne les tensions croissantes entre coopération judiciaire internationale et intérêts géopolitiques. L’épisode italien, marqué par la libération controversée de Najim, avait mis en lumière les limites de l’action de la CPI face aux résistances étatiques. En remerciant l’Allemagne pour sa coopération, la Cour espère relancer une dynamique plus ferme d’application de ses mandats dans le dossier libyen. Mais sans soutien politique clair des États impliqués, ces avancées risquent de rester ponctuelles.