L’ancien membre de l’escadron de la mort de Yahya Jammeh, Michael Sang Correa, a été condamné aux États-Unis à 67 ans et demi de prison pour torture et complot en vue de commettre la torture. Le jugement a été prononcé à Denver par la juge fédérale Christine M. Arguello, qui a qualifié ces actes de violations flagrantes des droits humains. Banjul a salué une décision « historique », y voyant une étape majeure dans la quête de justice pour les victimes du régime Jammeh.
Arrêté en 2020 après avoir dépassé la durée de son visa, Correa avait été reconnu coupable en avril 2025. Jugé sur la base de la loi extraterritoriale américaine sur la torture, il devient le premier ressortissant étranger condamné aux États-Unis pour de tels crimes commis hors du territoire. La juge a infligé 135 mois pour chacun des six chefs de torture et pour le chef de complot, les peines étant purgées consécutivement.
À l’époque des faits, Correa servait dans les Junglers, unité paramilitaire d’élite directement liée à Yahya Jammeh. Après le coup d’État manqué de 2006, les Junglers ont mené une répression brutale contre les putschistes présumés. Tortures, exécutions extrajudiciaires, disparitions forcées et violences sexuelles leur sont attribuées. Les victimes étaient notamment détenues à la prison de Mile 2 et au siège de la NIA, où elles subissaient électrocutions, passages à tabac, brûlures à l’acide et autres sévices.
Au tribunal, plusieurs survivants ont directement identifié Correa comme l’un de leurs tortionnaires. L’ancien commandant Pharing Sanyang l’a décrit comme « très agressif », cherchant à lui arracher de faux aveux. L’ex-serveur du Palais présidentiel, Ebou Jarjue, a raconté avoir été accusé à tort de tentative d’empoisonnement de Jammeh et emprisonné durant quatre ans après des tortures répétées. Tamsir Jasseh, ex-directeur de l’immigration et citoyen américano-gambien, a affirmé que Correa « s’amusait » à infliger la souffrance aux détenus.
Le ministère gambien de la Justice a salué une « victoire significative » et un « jalon important » pour la justice internationale. Selon Banjul, ce verdict envoie un message clair aux auteurs de crimes graves : « ils ne trouveront aucun refuge ». Les autorités gambiennes ont exprimé leur gratitude au gouvernement américain et aux procureurs chargés de l’affaire.
La condamnation de Correa s’inscrit dans la volonté affichée par Banjul de poursuivre les responsables des crimes de l’ère Jammeh. Le gouvernement a rappelé son intention de mettre en place un Bureau du Procureur spécial, chargé de traduire en justice les auteurs documentés par la Commission vérité, réconciliation et réparations (TRRC). Une étape qui, selon les observateurs, déterminera la capacité de la Gambie à solder définitivement l’héritage répressif de l’ancien régime.