La République centrafricaine pourrait connaître une embellie économique modeste dans les prochaines années. Selon le huitième Cahier économique présenté le 26 septembre à Bangui, la Banque mondiale prévoit une croissance de 2,8 % en 2027. Après une hausse limitée à 0,7 % en 2023, l’économie devrait atteindre 1,5 % en 2024, portée par le secteur agro-industriel et une meilleure disponibilité énergétique.
L’institution financière relève des signes positifs, notamment dans l’agriculture, l’agro-industrie et l’exploitation aurifère. L’augmentation des prix de l’or et la reprise de certaines activités à Bangui se sont traduites par des constructions et des infrastructures réhabilitées. Guido Rurangwa, représentant de la Banque mondiale à Bangui, insiste toutefois sur le caractère provisoire de ces estimations, qui reposent sur des hypothèses encore vulnérables aux aléas politiques et économiques.
L’économie centrafricaine sort difficilement d’une période marquée par des crises politico-militaires et la pandémie de Covid-19. Entre 2020 et 2023, la croissance est restée quasiment atone, oscillant autour de 0,7 %. Cette stagnation s’explique autant par l’instabilité sécuritaire que par la faiblesse des investissements publics et privés, accentuant les retards structurels d’un pays enclavé et dépendant de ses exportations minières et agricoles.
Si la prévision de 2,8 % apparaît encourageante, elle demeure conditionnée à plusieurs réformes. Les analystes insistent sur la nécessité de renforcer l’exploitation des ressources minières, de diversifier l’économie et d’améliorer le secteur de l’énergie et des transports. Pour l’économiste Lorenzo Ganazoui, une meilleure allocation du capital ouvrier vers l’agriculture reste une priorité, car ce secteur peut simultanément nourrir, employer et générer des revenus durables.
Au-delà des chiffres de croissance, le rapport souligne la gravité de la situation sociale. Plus de 65 % de la population vit dans une pauvreté extrême. La dépendance aux importations de carburant, les pénuries chroniques et la mauvaise gouvernance réduisent l’impact des rares périodes de croissance. L’amélioration du cadre institutionnel et la lutte contre la corruption sont présentées comme des conditions indispensables à toute stratégie de relance.
Les projections de la Banque mondiale offrent une lueur d’espoir, mais elles risquent de rester théoriques si les blocages structurels ne sont pas levés. La République centrafricaine devra concilier gestion des crises sécuritaires, investissement productif et gouvernance transparente pour transformer cette croissance annoncée en progrès tangible pour sa population. Sans cela, les prévisions resteront des chiffres sans répercussion sur le quotidien des Centrafricains.