L’opposant camerounais Issa Tchiroma Bakary, qui revendique la seconde place de la dernière présidentielle, se trouve actuellement en Gambie. Le gouvernement de Banjul a officialisé son accueil « temporaire » pour « raisons humanitaires », confirmant ainsi les rumeurs qui circulaient sur la disparition de l’ancien ministre du gouvernement camerounais. Cette annonce, faite le 23 novembre, jette une lumière nouvelle sur les tensions post-électorales au Cameroun et leurs répercussions régionales.
Selon le communiqué gambien, Issa Tchiroma Bakary séjourne à Banjul depuis le 7 novembre. Son départ du Cameroun serait intervenu fin octobre ou début novembre, peu après la proclamation des résultats officiels qu’il conteste farouchement. Son entourage justifie le choix de la Gambie par la liberté d’expression et la sécurité que le pays lui garantit. Le document officiel évoque également, de manière plus surprenante, des négociations en cours entre l’opposant et le pouvoir de Yaoundé, avec la médiation du Nigeria voisin.
Ce départ s’inscrit dans un contexte politique camerounais extrêmement tendu. L’élection présidentielle, remportée selon les résultats officiels par Paul Biya, a été marquée par des contestations virulentes de l’opposition, qui dénonce des irrégularités. Issa Tchiroma Bakary, figure politique du Nord, s’était retranché dans sa ville natale de Garoua avant de quitter le territoire. Sa situation illustre les pressions persistantes exercées sur les voix dissidentes au Cameroun, où la contestation du pouvoir en place est souvent périlleuse.
Les perspectives immédiates restent floues et dépendent largement des négociations évoquées. Si un dialogue est véritablement engagé sous l’égide nigériane, il pourrait ouvrir une voie de sortie de crise pour une opposition marginalisée. Cependant, l’issue de telles discussions est incertaine. Le statut « temporaire » du séjour en Gambie pose également la question de la solution à long terme pour l’opposant, entre un retour négocié au Cameroun, un asile politique prolongé ou un exil vers une autre destination.
L’information concernant des négociations est toutefois accueillie avec un scepticisme prononcé du côté du pouvoir camerounais. Une source gouvernementale, anonyme, a fermement démenti l’existence de telles discussions, arguant qu’« aucune crise postélectorale » ne justifierait un tel processus. Cette contradiction entre les déclarations gambiennes et la version de Yaoundé ajoute une couche d’opacité à toute l’affaire et interroge sur la nature réelle des canaux de communication existants.
Le parcours de l’opposant pour rejoindre la Gambie demeure partiellement élucidé. Des sources camerounaises affirment qu’il a transité par la ville nigériane de Yola, située non loin de la frontière avec le Cameroun et de sa base arrière de Garoua. Cet itinéraire suggère une sortie discrète du territoire et souligne le rôle clé du Nigeria, tant comme voie de passage que comme éventuel médiateur dans les affaires politiques de son voisin. La Gambie, quant à elle, renvoie une image de refuge pour les personnalités politiques en difficulté, un rôle qu’elle a parfois joué dans le passé.



