La semaine dernière, les autorités sud-africaines ont mis au jour une nouvelle affaire de migrants éthiopiens retenus contre leur gré dans la banlieue de Johannesburg. 44 personnes, dont plusieurs mineurs, ont été secourues dans des conditions de détention extrêmement difficiles. Cette découverte met en lumière une route migratoire peu étudiée reliant la Corne de l’Afrique à l’Afrique du Sud, un chemin qui semble s’intensifier malgré les dangers et les abus associés.
Le 29 janvier dernier, un autre groupe d’une vingtaine de migrants éthiopiens avait déjà été secouru dans une maison de Johannesburg, et l’année précédente, 90 autres avaient été retrouvés dans des conditions similaires. Ces migrants, attirés par l’espoir d’une vie meilleure en Afrique du Sud, se retrouvent malheureusement pris au piège une fois arrivés sur place. Faisal Garba, professeur à l’Université du Cap, explique que ces migrants, une fois entrés sur le territoire sud-africain, se trouvent contraints de rembourser leurs passeurs. “Ils paient ces passeurs et, une fois arrivés en Afrique du Sud, ils doivent payer le reste. Ils ne seront pas libres tant qu’ils n’auront pas donné l’argent. On passe donc d’un accord volontaire à une forme de coercition”, observe-t-il.
Le trajet migratoire reliant la Corne de l’Afrique à l’Afrique du Sud est moins documenté que les autres routes africaines, comme celles menant vers l’Europe ou les États du Golfe. Depuis 2020, plusieurs dizaines de corps de migrants éthiopiens ont été retrouvés dans des pays comme le Mozambique, la Zambie ou le Malawi, preuve des dangers inhérents à ce parcours. Emma van der Walt, de l’organisation “Brave to Love”, a souligné que beaucoup de ces migrants sont recrutés en Éthiopie par des passeurs basés au Kenya, qui les transportent ensuite dans des conditions abominables. “Ils sont parfois enfermés dans des voitures, affamés, battus. Cela peut être très violent”, déplore-t-elle.
Cette route migratoire dite “du sud” reste largement méconnue du grand public, mais elle est pourtant d’une importance croissante. En 2023, l’Organisation internationale pour les migrations a recensé près de 80 000 mouvements de migrants sur ce trajet. L’ampleur de cette migration est donc indéniable, mais sa documentation reste insuffisante, ce qui complique les efforts pour en comprendre les dynamiques et les risques associés.
Les migrants qui prennent cette route risquent bien plus que de simples difficultés administratives. En plus de la violence physique infligée par les passeurs, ils sont souvent confrontés à une insécurité totale et à des conditions de vie inhumaines. L’Afrique du Sud, malgré son attrait économique, ne semble pas offrir les protections nécessaires à ces populations vulnérables. Ces découvertes successives de migrants enfermés renforcent les appels à l’action pour mieux sécuriser les routes migratoires africaines et offrir des solutions viables à ceux qui cherchent refuge.
Les autorités sud-africaines, ainsi que les organisations internationales, se retrouvent devant un défi de taille. Les solutions pour sécuriser ces routes migratoires, punir les passeurs et offrir une aide humanitaire plus efficace doivent être renforcées. Cependant, il est essentiel de comprendre que la réponse ne peut pas se limiter à l’action répressive. La prévention de ces drames nécessite une approche globale, qui inclut la coopération régionale, des politiques migratoires plus humaines et des programmes de soutien aux migrants avant leur départ.
Des témoignages recueillis auprès de migrants secourus mettent en lumière l’ampleur de l’exploitation subie sur cette route migratoire. Ces récits, souvent marqués par la douleur et la peur, soulignent un besoin urgent d’une prise de conscience mondiale. “Nous n’avons pas choisi cette route. Nous sommes venus chercher une vie meilleure, mais tout ce que nous avons trouvé, c’est la souffrance”, confie un migrant récemment secouru. Ces voix, souvent ignorées, sont désormais un appel à l’action pour les autorités et les organisations humanitaires.