Le président Abdelmadjid Tebboune a prononcé, le 19 août, un discours empreint de références nationalistes à la veille des commémorations du 20 août, date qui rappelle à la fois l’Offensive du Nord-Constantinois (1955) et le Congrès de la Soummam (1956). Il a présenté l’Algérie comme un pays « fort et maître de sa décision », fidèle à « l’esprit de Novembre », en exaltant le sacrifice des moudjahidines et la continuité de la souveraineté nationale.
Dans son allocution, le chef de l’État a rappelé que ces deux événements avaient structuré la lutte indépendantiste et donné un écho international à la Révolution du 1er novembre 1954. Tebboune a insisté sur la fidélité au message des pionniers de l’indépendance, affirmant que l’Algérie s’était bâtie par la volonté de ses patriotes et qu’elle restait indépendante dans ses choix, malgré les pressions extérieures.
Mais ce récit officiel masque des contradictions profondes. L’Algérie demeure prisonnière d’une économie largement dépendante des hydrocarbures, fragilisée par une inflation persistante et par un chômage élevé, notamment chez les jeunes. Le climat social reste marqué par la défiance née du mouvement du Hirak, dont la répression a laissé des traces durables. Entre le discours d’un État souverain et la réalité d’une société en quête de réformes concrètes, le décalage est manifeste.
Sur la scène internationale, Alger revendique une autonomie stratégique. Mais son rapprochement avec Moscou et Pékin alimente les critiques d’une souveraineté davantage proclamée que pratiquée. Le pouvoir s’appuie sur l’héritage révolutionnaire comme source de légitimité, tout en conservant un système politique accusé d’immobilisme et de manque de transparence.
À travers ces commémorations, le pouvoir cherche à consolider un récit nationaliste et à renforcer une légitimité contestée. Or, les appels officiels à « l’essor et au bien-être » peinent à convaincre une population qui attend des réformes structurelles capables de diversifier l’économie et de réduire la dépendance au modèle rentier. Le défi pour Tebboune reste de transformer les slogans de souveraineté en politiques durables.
En invoquant la grandeur historique et les sacrifices anticoloniaux, le président tente de cimenter l’unité nationale. Mais pour une partie de la société, cette rhétorique répétée ne suffit plus à répondre aux attentes d’un quotidien marqué par les difficultés économiques, la crise politique et l’absence de perspectives claires. Le recours constant à la mémoire de la guerre d’indépendance apparaît de plus en plus comme un outil de légitimation, plutôt que comme un véritable projet de société.