Le septième sommet Union africaine (UA) – Union européenne (UE), qui s’est achevé à Luanda, se solde par une déclaration finale consensuelle mais dépourvue d’annonces majeures ou de ruptures stratégiques. Les deux blocs ont célébré vingt-cinq ans de partenariat dit “unique et stratégique” tout en multipliant les engagements dans des domaines allant du commerce à la sécurité, sans pour autant détailler les modalités pratiques ou le financement de ces ambitions affichées.
Le communiqué final, publié à l’issue de deux jours de travaux, égrène une liste de priorités partagées. Celles-ci incluent un soutien affiché au multilatéralisme, présenté comme un rempart contre le “chaos” international par le président du Conseil européen, Antonio Costa. Les dirigeants se sont également engagés à renforcer leurs relations commerciales et à développer une collaboration sur les minerais stratégiques. Sur la question migratoire, l’objectif affiché est de lutter contre l’immigration illégale tout en favorisant la mobilité légale. Les crises en Ukraine, au Soudan et en République démocratique du Congo (RDC) ont également figuré à l’agenda.
Ce sommet s’inscrit dans une relation historique complexe, souvent marquée par un déséquilibre de puissance et des attentes déçues. L’Afrique, forte d’une population jeune et de ressources critiques essentielles à la transition énergétique européenne, cherche aujourd’hui à redéfinir les termes de l’échange. Elle ne se contente plus d’exporter des matières premières brutes mais exige des investissements dans la transformation locale et la création de chaînes de valeur ajoutées sur son sol. Cette revendication, portée par des pays comme l’Angola, hôte du sommet, constitue la nouvelle ligne de fracture et de négociation avec une Europe qui promeut un “partenariat d’égaux” tout en préservant ses intérêts économiques et sécuritaires.
La véritable évaluation du sommet de Luanda interviendra à l’aune de la mise en œuvre des engagements pris. La pression sera forte pour transformer les déclarations d’intention en projets concrets, notamment dans le domaine des minerais critiques, où les promesses de création de chaînes de valeur locales sont scrutées avec scepticisme. Par ailleurs, la capacité des deux unions à parler d’une seule voix face aux crises régionales, comme celles au Soudan et en RDC, sera un test de crédibilité. Les divergences d’approches, illustrées par les critiques voilées de la diplomatie belge sur l’action européenne en RDC, laissent présager des difficultés à coordoner une réponse commune et efficace.
La position africaine a été résumée par le chef de la diplomatie angolaise, Tete Antonio, qui a insisté sur la nécessité de passer de l’exportation de cobalt à celle de batteries. “Nous avons rappelé qu’il faudra bien que l’on travaille de façon à ce que la prospérité soit partagée”, a-t-il déclaré, soulignant ainsi le cœur des attentes du continent. Cet appel à une relation économique plus équitable dépasse le cadre des minerais et s’étend à tous les secteurs, marquant une maturation stratégique de la partie africaine.
En marge des discours officiels, les crises sécuritaires ont révélé des lignes de tension. La condamnation des atrocités commises au Soudan par les Forces de soutien rapide (FSR) et le soutien réaffirmé aux processus de paix en RDC n’ont pas masqué les critiques. Le ministre belge des Affaires étrangères, Maxime Prévost, a ainsi pointé du doigt le désengagement relatif de l’UE après l’imposition de sanctions initiales en RDC, craignant que de nouvelles mesures ne soient instrumentalisées et ne nuisent aux médiations en cours. Cet aveu met en lumière les limites et les complexités de l’engagement européen sur les théâtres de crise africains.



