Le Mauritanien Sidi Ould Tah a été élu président de la Banque Africaine de Développement (BAD) à l’issue d’un scrutin organisé à Abidjan, ce 29 mai. Succédant au Nigérian Akinwumi Adesina, il prend les rênes d’une institution centrale pour le financement du développement en Afrique, avec 76 % des voix face à ses concurrents zambien et sénégalais.
Cette élection, qui s’est déroulée en marge des assemblées annuelles de la BAD, a réuni les gouverneurs représentant les 54 États africains membres et les 27 pays actionnaires non africains. Le large score obtenu par Sidi Ould Tah – contre Samuel Munzele Maimbo (20 %) et Amadou Hott (3,5 %) – traduit le poids diplomatique croissant de la Mauritanie sur la scène continentale. L’enjeu ? Une BAD appelée à financer des projets de plus en plus ambitieux face à des défis économiques majeurs.
L’élection de Sidi Ould Tah intervient alors que l’Afrique peine à mobiliser des capitaux à des coûts raisonnables. Les taux prohibitifs d’emprunt étouffent l’investissement structurel, accentuant les inégalités et freinant la croissance. Candidat expérimenté, Ould Tah a défendu un programme articulé autour de quatre priorités, avec une insistance sur le renforcement des partenariats financiers et le développement d’instruments innovants.
Au-delà de la finance, Ould Tah veut placer le capital humain au centre de sa stratégie. Il propose des mesures pour formaliser l’économie informelle et dynamiser les micro-entreprises, en mobilisant fiscalité incitative, outils numériques et financements ciblés. En parallèle, il prône un plan ambitieux de développement d’infrastructures durables : chaînes de valeur autour des ressources locales, connectivité numérique, intégration logistique et respect des exigences climatiques. Chaque dollar investi devra combiner impact économique et résilience.
L’arrivée de Sidi Ould Tah à la tête de la BAD pourrait redéfinir les priorités d’investissement du continent. Son programme promet une BAD plus proactive, avec un levier accru sur les financements privés et multilatéraux. Toutefois, il reste à voir si cette approche ambitieuse saura convaincre face aux contraintes budgétaires des États africains et à la frilosité des marchés.
La large victoire de Sidi Ould Tah ne dissipe pas les interrogations sur l’efficacité réelle de sa feuille de route. L’enjeu sera de transformer ses promesses en projets concrets, en tenant compte des réalités politiques et économiques locales. Les ambitions annoncées doivent se confronter à la lenteur des réformes et à la complexité du terrain africain. La BAD sera-t-elle capable, sous sa direction, de se réinventer face à un continent en mutation ?