Le Bénin, souvent cité comme un modèle démocratique en Afrique de l’Ouest, se prépare à une élection présidentielle privée de son principal parti d’opposition. Cette exclusion marque un tournant critique pour la nation, remettant en cause la vitalité de son pluralisme politique longtemps célébré.
Les récentes réformes électorales, notamment la loi sur la charte des partis et les conditions de parrainage, ont progressivement restreint l’accès aux scrutins. Présentées comme des mesures de rationalisation du système partisan, elles ont dans les faits écarté une frange significative de l’opposition. Le paysage politique se recompose ainsi autour des formations proches du pouvoir, laissant peu de place à une compétition équitable.
Cette situation contraste vivement avec l’héritage de la Conférence nationale de 1990, qui avait institué le multipartisme intégral et fait du Bénin un pionnier des transitions démocratiques en Afrique. Depuis l’arrivée au pouvoir de Patrice Talon en 2016, plusieurs réformes ont progressivement resserré le cadre des libertés politiques, au nom de la stabilité et de l’efficacité gouvernementale.
À moyen terme, cette marginalisation de l’opposition risque d’affaiblir la légitimité des institutions et d’alimenter un ressentiment populaire. La communauté internationale, bien que réservée dans ses critiques, observe avec inquiétude cette évolution qui s’apparente à une dérive autoritaire sous couvert de légalité. Le risque est de voir le Bénin basculer dans une démocratie simplement procédurale, vidée de sa substance compétitive.
Certains analystes soulignent cependant les divisions internes de l’opposition, qui n’a pas su proposer une alternative crédible face aux nouvelles règles du jeu politique. Fragmentée et parfois absorbée par des querelles intestines, elle peine à incarner un projet rassembleur capable de mobiliser l’électorat au-delà des clivages traditionnels.
Malgré ce constat, la responsabilité première incombe au pouvoir en place. Gouverner démocratiquement implique de garantir des élections véritablement inclusives, où le citoyen bénéficie d’un choix authentique. La société civile béninoise reste vigilante, mais son influence semble limitée face à un exécutif déterminé à contrôler l’espace politique.
L’enjeu dépasse les frontières béninoises. Dans une région ouest-africaine fragilisée par les putschs et les transitions violentes, la détérioration du modèle béninois pourrait signer un recul démocratique plus général. Le pays se trouve à la croisée des chemins : préserver l’esprit de 1990 ou rejoindre la liste des démocraties confisquées.



