La Côte d’Ivoire, premier fournisseur africain de caoutchouc naturel, explore de nouvelles opportunités économiques en valorisant les graines d’hévéa, auparavant perçues comme des déchets. Cette démarche vise à diversifier les sources de revenus du pays, notamment à travers la production de biocarburants, en partenariat avec le groupe pétrogazier italien ENI. En juillet 2024, la campagne de collecte de graines a débuté, avec un objectif ambitieux de 50 000 tonnes, destinées à la transformation en huile végétale, qui sera ensuite acheminée vers des bioraffineries.
Cette initiative vise à transformer les graines d’hévéa en biocarburants et en biomasse, ouvrant de nouvelles perspectives pour la filière hévéicole ivoirienne, jusque-là axée sur le caoutchouc naturel. En partenariat avec ENI, la Côte d’Ivoire ambitionne de donner une seconde vie aux graines d’hévéa, participant ainsi à une économie plus verte et à une utilisation durable de la biomasse. La production d’huile végétale à partir de ces graines marque un tournant pour l’industrie et pourrait se traduire par une augmentation des revenus des acteurs du secteur.
Dans un contexte de demande croissante pour des énergies renouvelables, la Côte d’Ivoire se positionne comme un acteur clé dans la production de biocarburants en Afrique. Le marché mondial des biocarburants est en plein essor : évalué à près de 120 milliards de dollars en 2023, il pourrait atteindre plus de 175 milliards d’ici 2030, voire 235 milliards d’ici 2031 selon certaines prévisions. Cette dynamique représente une opportunité considérable pour les producteurs ivoiriens de graines d’hévéa, qui pourront profiter d’une demande en pleine expansion.
Le gouvernement ivoirien aspire également à développer une industrie locale des biocarburants. En octobre dernier, Sidiki Cissé, directeur général de l’Agence nationale d’appui au développement rural (ANADER), a révélé que la Société ivoirienne de raffinage (SIR) a déjà réussi à produire 1 500 litres de biodiesel à partir des graines d’hévéa. Ce projet est le résultat d’une collaboration entre divers acteurs, dont la SIR, ANADER, Scania et TotalEnergies, démontrant la viabilité technique et économique de cette nouvelle filière.
La Côte d’Ivoire, en tant que troisième producteur mondial de caoutchouc naturel, dispose d’un potentiel important pour l’approvisionnement en graines d’hévéa destinées aux biocarburants. Avec près de 700 000 hectares de plantations d’hévéa, la Côte d’Ivoire se fixe pour ambition d’atteindre 800 000 hectares d’ici 2027. Selon Michel Koblavi-Dibi, président de la Fédération des producteurs de la filière, la capacité de collecte des graines pourrait s’élever à 93 000 tonnes dès 2024, une avancée significative vers l’intégration des biocarburants dans l’économie nationale.
Cette démarche pourrait également inspirer les autres pays producteurs de caoutchouc en Afrique de l’Ouest, tels que le Nigéria, le Ghana et le Liberia. Ces nations, qui concentrent une grande partie de la production régionale d’hévéa, ont la possibilité de suivre l’exemple ivoirien pour diversifier leurs sources de revenus et réduire leur dépendance aux fluctuations des marchés mondiaux du caoutchouc. Pour les petits exploitants agricoles, cette initiative pourrait se traduire par une augmentation des revenus et une meilleure résilience économique, ouvrant ainsi la voie à une transition vers une économie plus verte.