Le général-major Bertin Gahungu, ancien patron des services de renseignement burundais et figure influente du régime, a été arrêté le 21 août à Bujumbura. Selon des sources sécuritaires, il est détenu par les services de renseignement pour des accusations d’atteinte à la sûreté intérieure et d’outrage au chef de l’État. L’annonce officielle de son incarcération, le lendemain, a provoqué une onde de choc dans les cercles du pouvoir.
Les autorités l’accusent d’avoir tenu récemment des propos hostiles au président Évariste Ndayishimiye. Cette arrestation est interprétée par certains observateurs comme une sanction politique. Pacifique Nininahazwe, figure de la société civile en exil, y voit « un moment de disgrâce » pour un proche de l’ancien président Pierre Nkurunziza, décédé en 2020. Les charges officielles sont vagues, mais elles interviennent dans un climat de tensions internes au sein du CNDD-FDD.
Bertin Gahungu n’est pas un officier comme les autres. Cadre du CNDD-FDD, il a joué un rôle central dans la répression du mouvement contre le troisième mandat présidentiel en 2015. À cette époque, plus d’un millier de personnes ont été tuées et près de 400 000 Burundais ont fui le pays. Des ONG et des défenseurs des droits humains l’accusent d’actes de torture et d’exécutions extra-judiciaires, qui n’ont jamais été jugés.
Cette arrestation soulève des interrogations sur les équilibres internes du régime. Pour certains analystes, Gahungu était devenu un fardeau, son nom rappelant constamment la brutalité de la répression passée. Sa mise à l’écart pourrait être une tentative de Ndayishimiye de consolider son autorité et de se démarquer de l’héritage sécuritaire de Nkurunziza. Mais rien n’indique pour l’instant que des poursuites sérieuses seront engagées sur ses responsabilités passées.
Pour Armel Niyongere, avocat et président de l’Acat-Burundi, cette arrestation illustre moins une volonté de justice qu’une rivalité interne au pouvoir. « Ce sont les crimes de 2015 qui devraient être au centre des poursuites », insiste-t-il, rappelant que les victimes attendent toujours que les responsables soient jugés par une justice indépendante. Il déplore que, comme souvent au Burundi, les règlements de comptes politiques priment sur la vérité judiciaire.