La République centrafricaine a conclu un accord de paix avec les groupes armés 3R et UPC, deux des mouvements les plus influents encore actifs dans le pays. L’annonce a été faite sous la médiation directe du président tchadien Mahamat Idriss Déby, marquant une avancée majeure dans les efforts de pacification après plus d’une décennie de conflits. Ce rapprochement, soutenu par le président Faustin-Archange Touadéra, vise à désarmer les groupes rebelles, intégrer leurs combattants et rétablir pleinement l’autorité de l’État.
L’accord prévoit l’arrêt immédiat des hostilités, la mise en œuvre d’un programme de désarmement, démobilisation et réinsertion (DDR), ainsi qu’un processus d’intégration politique des ex-combattants. Un mécanisme de suivi placé sous l’égide du Tchad doit garantir la mise en œuvre des engagements. Le retour annoncé à Bangui des chefs rebelles Oumar Abdel Kader (“Sembe Bobbo”, leader des 3R) et Ali Darassa (chef de l’UPC) illustre cette volonté de réconciliation, officiellement qualifiée de « calumet de la paix ».
Depuis 2013, la Centrafrique est plongée dans une spirale de violences intercommunautaires et de rivalités politico-militaires. Malgré l’intervention de la MINUSCA et les accords d’Addis-Abeba (2019), plusieurs groupes armés, dont les 3R et l’UPC, ont continué de défier l’autorité de l’État. Ces factions contrôlaient encore récemment des zones entières du nord-ouest et du centre du pays, rendant toute stabilisation durable impossible sans leur implication dans un processus de paix.
Ce nouvel accord pourrait ouvrir la voie à une pacification progressive du territoire, mais il reste suspendu à la bonne foi des signataires et à la capacité des États impliqués à garantir le désarmement effectif. L’implication directe du Tchad, à travers son président, donne un poids diplomatique inédit à cette initiative. En plaçant N’Djamena comme garant du processus, le pouvoir centrafricain cherche à désamorcer durablement les tensions et à empêcher toute résurgence des violences.
Au-delà de la Centrafrique, cette médiation s’inscrit dans une stratégie plus large du Tchad pour renforcer son rôle de faiseur de paix au Sahel et en Afrique centrale. Mahamat Idriss Déby, confronté à ses propres défis internes, cherche également à légitimer son pouvoir sur la scène internationale. En parrainant cet accord, il affirme son influence régionale tout en envoyant un signal à ses voisins et partenaires occidentaux.
Reste à savoir si cet accord marquera un réel tournant ou s’il ne s’agit que d’un épisode de plus dans la longue série de pactes non tenus en Centrafrique. La réussite du processus dépendra de l’inclusivité politique, du soutien logistique et financier au programme DDR, et surtout d’une volonté sincère de rompre avec les logiques de prédation. À ce jour, peu de garanties concrètes ont été communiquées sur les modalités précises d’intégration des ex-combattants ou sur le sort judiciaire des chefs rebelles.