Kémi Séba, président de l’ONG Urgences Panafricanistes, a été interpellé le 31 mars 2025 à Brazzaville, en République du Congo, par les services de renseignement locaux, alors qu’il devait animer une conférence sur le franc CFA. Quelques heures après son arrestation, l’activiste panafricaniste a été relâché. Cet incident survient dans un contexte où Séba continue de dénoncer les effets du franc CFA, qu’il considère comme un outil du néocolonialisme qui asphyxie les peuples africains.
L’interpellation de Kémi Séba est survenue juste avant la conférence qu’il devait animer sur les enjeux du franc CFA, monnaie utilisée par plusieurs pays d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique centrale. Dans une vidéo partagée sur les réseaux sociaux après sa libération, il a exprimé sa gratitude envers ceux qu’il qualifie de ses “ennemis”, soulignant que leur action avait attiré davantage d’attention sur son message. Selon lui, la question du franc CFA est un sujet extrêmement sensible, notamment pour les régimes africains toujours sous l’influence de la France, qui contrôle une grande partie de ces monnaies à travers des mécanismes tels que la convertibilité et la gestion des réserves.
Le franc CFA est une monnaie qui existe sous deux formes distinctes : le franc CFA de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) et le franc CFA de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC). Malgré les réformes qui ont été mises en place au fil des ans, cette monnaie reste sous la tutelle de la France, qui détient les réserves de change et participe à la gestion de la politique monétaire de ces zones. Kémi Séba, connu pour son engagement dans le panafricanisme, dénonce depuis longtemps cette relation néocoloniale qu’il considère comme un frein au développement économique des pays africains.
L’interpellation de Kémi Séba soulève une fois de plus la question de l’indépendance économique des pays africains, notamment en ce qui concerne leur politique monétaire. Si certains acteurs politiques et économiques affirment que le franc CFA a permis la stabilité de la monnaie et de l’inflation dans les pays concernés, d’autres, comme Kémi Séba, estiment que cette stabilité est avant tout un camouflage pour maintenir l’Afrique sous le contrôle de la France. Le débat autour du franc CFA pourrait donc se raviver avec de nouvelles voix appelant à sa suppression ou à une réforme radicale, d’autant plus que certains pays, comme la Côte d’Ivoire, la Guinée ou le Burkina Faso, ont récemment montré un intérêt pour des alternatives.
Cet événement à Brazzaville s’inscrit dans un contexte plus large de réappropriation de la souveraineté économique par les pays africains. L’initiative de Kémi Séba, à travers son ONG, se veut une réponse à ce qu’il considère comme un héritage néocolonial. Plusieurs autres acteurs panafricanistes et mouvements sociaux partagent son point de vue, soutenant que les nations africaines doivent se libérer des influences étrangères pour pouvoir développer des politiques économiques adaptées à leurs réalités. Cependant, l’opposition à ce système monétaire reste divisée : certains estiment que l’absence de garanties financières, si le franc CFA venait à disparaître, pourrait entraîner une instabilité économique.
Les réactions à l’interpellation de Kémi Séba ont été partagées. D’un côté, certains soutiennent l’activiste en tant que porte-voix des populations africaines qui souffrent des conséquences du franc CFA. De l’autre, les autorités congolaises ont justifié l’arrestation en raison de la nature sensible du sujet et de la manière dont il a été abordé. Cette affaire pourrait donc marquer un tournant dans la manière dont les débats sur le franc CFA sont menés en Afrique, en particulier à un moment où de plus en plus de citoyens et de responsables politiques s’interrogent sur la pérennité de ce système monétaire.