Selon un rapport de la Banque africaine d’import-export (Afreximbank) publié le 28 mai 2025, six pays africains totalisent à eux seuls 50 % de l’encours de la dette extérieure du continent. Il s’agit de l’Afrique du Sud (13,1 %), de l’Égypte (12 %), du Nigeria (8,4 %), du Maroc (5,9 %), du Mozambique (5,3 %) et du Soudan (5,2 %). Cette concentration accroît les risques de contagion financière en cas de défaut ou de turbulence dans l’un de ces pays.
Cette surreprésentation expose l’Afrique à des chocs financiers systémiques. Une crise dans l’un de ces six États pourrait déclencher un effet domino, affectant la perception des investisseurs envers l’ensemble du continent, perturber les flux financiers transfrontaliers ou compromettre les échanges commerciaux régionaux. Par ailleurs, bien que les niveaux d’endettement varient fortement d’un pays à l’autre, plus de 60 % des États africains présentent aujourd’hui un ratio dette/PIB supérieur à 50 %. Dans des cas extrêmes comme le Ghana ou le Soudan, ce ratio dépasse même les 100 %.
Cette situation trouve ses racines dans la décennie 2010, marquée par une ruée vers les marchés internationaux de la dette. De nombreux pays africains, notamment en Afrique du Nord et en Afrique de l’Ouest, ont multiplié les emprunts en devises, souvent à taux variables. Résultat : des charges de remboursement plus lourdes et une exposition accrue aux aléas des marchés mondiaux. Le recours aux euro-obligations et aux dettes à court terme aggrave encore cette fragilité, en particulier dans un contexte de resserrement monétaire global.
Afreximbank estime toutefois que la tendance pourrait s’inverser à moyen terme. Le ratio dette/PIB du continent devrait progressivement reculer pour atteindre environ 55 % en 2029, contre un pic de près de 63 % en 2020. Cette amélioration reposerait notamment sur une gestion budgétaire plus rigoureuse et sur les résultats des initiatives de restructuration de la dette lancées dans le cadre du G20, qui commencent à produire des effets dans des pays comme la Zambie, l’Éthiopie ou le Ghana.
Le rapport alerte cependant sur le poids croissant du service de la dette : 25 pays dépassent le seuil critique de 20 % des recettes publiques fixé par le FMI. Le cas du Mozambique est emblématique, avec un ratio dette/recettes publiques supérieur à 120 %. Une telle situation entrave la capacité de l’État à financer ses politiques publiques. À cela s’ajoute l’érosion des réserves de change. En 2025, près de la moitié des pays africains devraient passer sous le seuil de couverture des trois mois d’importations, une norme de viabilité fixée par le FMI.
Pour limiter la dépendance aux créanciers commerciaux, le rapport recommande un recentrage stratégique sur la mobilisation des ressources nationales. Il préconise aussi un renforcement des partenariats avec les bailleurs concessionnels et un engagement plus actif en faveur d’une réforme de l’architecture financière mondiale. L’objectif : garantir un accès plus équitable aux financements à conditions préférentielles et mettre en place des mécanismes efficaces de réduction ou de rééchelonnement de la dette.