Au Cameroun, la relance du port fluvial de Garoua reste en suspens. Situé au nord du pays, ce site construit en 1935 pourrait devenir un levier crucial pour le commerce régional, notamment avec le Nigeria voisin. Mais faute de financements et de travaux concrets, sa réhabilitation lancée en 2021 par le président Paul Biya tarde à se matérialiser.
Aujourd’hui, les activités du port tournent au ralenti. En saison sèche, les eaux de la Bénoué sont trop basses, rendant la navigation difficile. Malgré tout, certains commerçants continuent d’y recourir. « Par voie fluviale, je transporte plus, avec moins de tracasseries », confie Al Hadji Issa, exportateur de coton. Mais ces cas restent isolés. « Cela fait trois semaines qu’il n’y avait plus d’activité », admet Abbassi Ben, le régisseur du port, qui déplore l’absence de grues ou d’équipements adaptés.
Le projet de réhabilitation du port avait suscité beaucoup d’espoirs lors de son annonce en 2021. Il devait moderniser les installations, stimuler les échanges sous-régionaux et améliorer les recettes douanières. La ville de Garoua, tout comme les pays enclavés voisins – Tchad, Centrafrique – pourraient y trouver un débouché logistique précieux. Mais à ce jour, seuls des relevés topographiques et des études de faisabilité ont été menés.
L’exécution des travaux reste conditionnée au déblocage des financements, évalués en 2022 à 16 milliards de FCFA, soit environ 24 millions d’euros. La communauté urbaine de Garoua, officiellement gestionnaire du site, attend toujours des fonds. « Les études sont bouclées. Il faut maintenant draguer le port. On attend les moyens », résume Noivouna Hakassou, adjoint au maire.
Le port de Garoua est un point de passage stratégique. En saison des pluies, c’est par là que transitent des marchandises venues du Nigeria : aliments, matériaux de construction ou produits manufacturés. Le régisseur du port l’affirme : « Sans le Nigeria, à dire vrai, le Nord Cameroun n’existerait pas. » Restaurer ce lien logistique pourrait donc redonner souffle à une région économiquement dépendante de son voisin.
Au-delà des enjeux locaux, la réhabilitation du port s’inscrit dans une vision plus large d’intégration économique régionale. Une fois opérationnel, le site pourrait renforcer les échanges entre le Cameroun, le Nigeria, le Tchad et la Centrafrique. Pour les opérateurs économiques, c’est un projet vital. « Cela doit faire en sorte que les activités de nos businessmen soient plus fluides », insiste le régisseur du port. Encore faut-il que les promesses de modernisation ne restent pas lettre morte.