Une plainte inédite a été déposée en Allemagne en septembre 2024, visant des responsables éthiopiens et érythréens pour leur rôle dans les violences commises durant la guerre du Tigré (2020-2022), qui a fait plus de 600 000 victimes. Huit témoins directs de ces atrocités, principalement résidents en Allemagne, ont déposé la plainte, accusant les hauts dignitaires des deux pays d’être responsables de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité. Cet acte marque une avancée importante dans la recherche de justice pour les victimes de ce conflit dévastateur.
Les plaignants, dont les noms restent anonymes, ont apporté des preuves accablantes de meurtres, viols, et détentions arbitraires perpétrés pendant le conflit. L’avocat Nick Leddy, ancien membre du Bureau du Procureur de la Cour pénale internationale (CPI), à la tête de l’association Legal Action Worldwide, précise que la plainte repose sur une analyse approfondie de preuves obtenues à partir de sources ouvertes, ainsi que sur des témoignages directs de victimes et de témoins. Leddy estime que ces éléments devraient suffire à inciter la justice allemande à ouvrir une enquête et, potentiellement, à émettre des mandats d’arrêt contre les responsables.
Le conflit du Tigré a éclaté en novembre 2020, opposant le gouvernement éthiopien et ses alliés érythréens au Front de libération du peuple du Tigré (TPLF). Ce conflit, qui a dévasté la région du Tigré, a été marqué par de nombreuses violations des droits humains, notamment des massacres de civils, des violences sexuelles, et des déplacements forcés. Bien que le cessez-le-feu signé en novembre 2022 ait mis fin aux combats, les tensions persistent dans la région et les accusations de crimes de guerre continuent de planer sur les parties en conflit.
La plainte déposée en Allemagne pourrait avoir des répercussions importantes pour la justice internationale. En poursuivant cette action judiciaire, les plaignants espèrent non seulement traduire les responsables devant la justice, mais aussi envoyer un message fort à l’ensemble de la communauté internationale sur la nécessité de rendre des comptes pour les atrocités commises. Si l’Allemagne ouvre une enquête, cela pourrait encourager d’autres pays à suivre son exemple et à prendre des mesures contre les responsables de crimes de guerre à l’échelle mondiale.
La situation au Tigré reste préoccupante. Les tensions entre l’Éthiopie et l’Érythrée n’ont pas cessé, malgré l’accord de paix signé entre le gouvernement fédéral et le TPLF. Le 14 mars 2025, l’Union africaine a exprimé sa « profonde inquiétude » face à la détérioration de la situation dans la région. Cette plainte intervient dans un contexte où d’autres organisations, comme l’association de Nick Leddy, avaient déjà dénoncé les violations des droits humains en 2022, avec des appels à des mesures conservatoires d’urgence de la Commission africaine des droits de l’Homme.
Cette plainte représente bien plus qu’une simple action judiciaire : elle est un acte de mémoire pour les milliers de victimes oubliées du conflit du Tigré. En faisant entendre leurs voix devant la justice internationale, les plaignants espèrent non seulement obtenir réparation, mais aussi faire en sorte que les horreurs vécues ne tombent pas dans l’oubli. Leurs démarches incarnent la lutte contre l’impunité et pour la reconnaissance des souffrances infligées à toute une population. La communauté internationale doit maintenant faire face à l’enjeu moral et juridique de ce combat pour la vérité et la justice.