En Guinée, la junte militaire au pouvoir, dirigée par le Comité national du rassemblement pour le développement (CNRD), a annoncé que la transition politique ne prendra pas fin en décembre 2024, comme initialement prévu. Cette déclaration a immédiatement déclenché une vague de protestations de la part de l’opposition, qui voit dans cette décision une rupture avec les engagements pris par la junte pour rétablir un processus démocratique. Le porte-parole du gouvernement, Ousmane Gaoual Diallo, a justifié ce prolongement par le besoin de continuer la « refondation de l’État », un processus déjà entamé selon lui, et qui nécessiterait plus de temps.
Ousmane Gaoual Diallo a précisé que la Guinée se trouve actuellement dans une nouvelle phase de la transition, marquée par la refondation de l’État, telle qu’énoncée dans l’article 2 de la charte de transition. Toutefois, cette annonce n’a pas dissipé les inquiétudes des partis d’opposition. Ceux-ci soulignent l’absence de précisions concernant le calendrier électoral et l’absence de toute annonce officielle sur la tenue du référendum constitutionnel tant attendu. Le RPG Arc-en-ciel, principal parti d’opposition, a exprimé de vives inquiétudes face à ce flou, estimant que les engagements pris pour 2024, notamment la tenue du référendum constitutionnel, ont été oubliés.
La Guinée a connu un coup d’État militaire en septembre 2021, avec la prise de pouvoir du CNRD dirigé par Mamadi Doumbouya. Depuis lors, le pays traverse une période de transition politique après plusieurs années de gouvernance d’Alpha Condé, dont le mandat a été marqué par des contestations populaires et une répression de l’opposition. Le CNRD s’était initialement engagé à organiser des élections démocratiques et à remettre le pouvoir aux civils d’ici fin 2024. Cette promesse faisait partie d’un ensemble de mesures visant à restaurer la stabilité et la confiance dans le pays, fragilisé par des années de tensions politiques.
Le prolongement de la transition risque d’accentuer les tensions politiques en Guinée. L’opposition, qui a déjà dénoncé à plusieurs reprises l’absence de progrès concrets, pourrait se radicaliser face à ce qui est perçu comme un recul démocratique. Les déceptions accumulées pourraient aussi entraîner des manifestations de grande envergure et un renforcement des critiques internationales. Par ailleurs, l’absence de clarté sur la question électorale alimente les préoccupations de la population, qui reste dans l’attente de réformes majeures promises par la junte.
Des figures de l’opposition, telles que Marc Yombouno du RPG Arc-en-ciel, expriment leur frustration et appellent à un retour aux engagements pris par le CNRD, en particulier la tenue du référendum constitutionnel dans les plus brefs délais. Selon lui, le discours officiel du gouvernement, qui évoquait un calendrier précis pour 2024, est désormais vidé de son sens. La situation actuelle, marquée par un manque de transparence, fait craindre une manipulation du processus politique, visant à maintenir la junte au pouvoir plus longtemps.
Alors que la Guinée se trouve à un carrefour décisif, l’incertitude persiste quant à l’avenir de la transition. Si le gouvernement entend poursuivre le processus de « refondation », cela pourrait offrir l’opportunité d’une transformation structurelle du pays. Cependant, le prolongement de la transition sans calendrier électoral précis pourrait compromettre la crédibilité de la junte et mettre en péril la stabilité du pays. Les mois à venir seront cruciaux pour déterminer si un dialogue sincère peut être rétabli entre le gouvernement et l’opposition, et si la Guinée pourra finalement tourner la page du régime militaire.