En cette Journée mondiale des réfugiés, célébrée chaque 20 juin, les chiffres publiés par le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) donnent le vertige : 120 millions de personnes sont aujourd’hui déplacées de force à travers le monde. Alors que les besoins humanitaires atteignent des sommets, les financements, eux, s’effondrent. Pour les ONG sur le terrain, comme Handicap International, l’alerte est claire : la solidarité internationale vacille dangereusement.
Selon Jérôme Bobin, responsable des financements institutionnels chez Handicap International, la tendance est inquiétante. Après une baisse de 10 % de l’aide humanitaire en 2024, l’année 2025 s’annonce encore plus critique, notamment du fait du retrait brutal des financements américains, qui représentaient à eux seuls près de 45 % de l’aide mondiale. D’autres donateurs majeurs comme la France, l’Union européenne ou l’Allemagne annoncent déjà des réductions budgétaires pour 2026 et 2027. Dans un contexte d’arbitrages nationaux de plus en plus défavorables à l’aide internationale, cette dernière devient la variable d’ajustement.
Les causes de cette explosion du nombre de réfugiés sont multiples : conflits armés, dérèglement climatique, crises économiques. Le Moyen-Orient, l’Afrique, l’Amérique latine sont tous touchés. En Afrique, le Soudan du Sud, le Soudan, la RDC ou encore la Somalie figurent parmi les principaux pays de départ. Dans le Sahel, le nombre de réfugiés a triplé en quatre ans, passant de 215 000 en 2020 à plus de 640 000 en 2024. Et près de 67 % de ces personnes déplacées restent dans des pays voisins, eux-mêmes confrontés à des défis économiques et sécuritaires.
En Afrique, certains pays continuent pourtant d’accueillir massivement. L’Ouganda héberge à lui seul 1,7 million de réfugiés, grâce à une politique inclusive saluée par l’ONU, qui offre accès à l’éducation, à la santé et à la terre. Le Tchad, devenu en 2024 le deuxième pays d’accueil du continent, reçoit en moyenne 3 300 réfugiés soudanais par jour. L’Éthiopie héberge, elle, plus d’un million de réfugiés. Ces pays montrent que l’accueil est possible, mais leurs capacités sont sous pression constante.
Plus de la moitié des réfugiés dans le monde sont des enfants. Exposés à la malnutrition, à la violence ou privés d’éducation, ils sont les premières victimes de cette crise prolongée. Dans ce contexte, les coupes budgétaires compromettent gravement la réponse humanitaire. Le peu de perspectives de retour, notamment dans les zones de conflit comme le Soudan ou le Sahel, laisse craindre une crise prolongée, voire structurelle.
La baisse des financements n’est pas conjoncturelle, elle traduit une lassitude, voire un désengagement de certains États face à des crises perçues comme lointaines. Pourtant, les besoins sont là, immenses. Et l’alternative est claire : soit la communauté internationale investit dans la prévention et la protection, soit elle en paiera le prix sous d’autres formes – instabilités régionales, flux migratoires non maîtrisés, crises humanitaires prolongées. En cette Journée mondiale des réfugiés, le constat est amer : les réfugiés se multiplient, les réponses s’amenuisent.