La Chine vient d’instaurer pour la première fois une allocation nationale de 420 euros par an et par enfant de moins de trois ans, rétroactive au 1er janvier 2025. Cette mesure historique intervient alors que la population chinoise connaît sa troisième année consécutive de déclin démographique, avec près de deux fois moins de naissances en 2024 qu’en 2016, année de l’abandon de la politique de l’enfant unique.
Cette allocation, qui concerne plus de 20 millions de familles selon l’agence Xinhua, s’applique de manière uniforme pour le premier, deuxième ou troisième enfant. Contrairement aux dispositifs précédents qui relevaient des collectivités locales de façon disparate, cette aide marque un tournant dans la stratégie démographique du gouvernement central. Les familles pourront effectuer leurs démarches en ligne ou directement auprès des administrations, selon le calendrier établi par chaque province.
Le pays le plus peuplé du monde pendant des décennies a cédé sa place à l’Inde en 2023. Cette inversion démographique constitue le contrecoup direct de la politique de l’enfant unique, qui a créé un vieillissement accéléré de la population active. Cette situation menace directement la productivité et la croissance économique chinoises. Les projections démographiques annoncent une population qui pourrait passer sous la barre des 800 millions d’habitants d’ici 2100, confrontant la Chine au redoutable syndrome du “vieillir avant de s’enrichir”.
L’efficacité de cette mesure reste incertaine face à l’ampleur du défi. Les finances publiques déjà tendues, avec de nombreux gouvernements locaux endettés et parfois incapables de payer leurs fonctionnaires, questionnent la soutenabilité à long terme de cette politique nataliste. Le gouvernement envisage parallèlement d’étendre les congés maternité et étudie d’autres incitations pour accompagner cette allocation.
Certaines expériences locales montrent des résultats encourageants mais limités. À Tianmen, les naissances ont progressé de 17% après l’introduction d’aides substantielles, tandis qu’à Hohhot, les familles peuvent recevoir jusqu’à 12 000 euros pour un troisième enfant. Ces exemples illustrent que les incitations financières peuvent avoir un impact, même modeste.
Pour les experts, le véritable obstacle dépasse la dimension économique. Dans les zones urbaines, l’absence d’enfant devient un choix assumé, parfois militant, reflétant une transformation culturelle profonde. Quand le désir d’enfant persiste, il est souvent différé indéfiniment. Inverser durablement cette tendance nécessiterait des réformes structurelles majeures : repenser la place des femmes sur le marché du travail, alléger la charge éducative pesant sur les familles, renforcer massivement les services publics de garde d’enfants. Mais ces transformations prennent du temps, alors que l’urgence démographique, elle, ne souffre aucun délai.