L’Algérie a choisi d’interdire formellement les cryptomonnaies, en durcissant sa législation contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. La nouvelle loi n°25-10, récemment modifiée, introduit un article 6 bis qui criminalise l’usage, la détention, la promotion, l’achat, la vente et le minage de crypto-actifs. Ce verrou juridique fait du pays l’un des rares États africains à bannir totalement les monnaies virtuelles, sans distinction d’usage ni nuance d’application.
Ce choix législatif s’inscrit dans une logique sécuritaire : les autorités justifient l’interdiction par la nécessité de contrôler les flux financiers et de prévenir les activités criminelles. Mais derrière cet argument, c’est surtout l’incapacité de l’État à concevoir un cadre réglementaire adapté à l’innovation qui transparaît. Là où d’autres pays cherchent à encadrer sans freiner, Alger tranche dans le vif, refusant toute expérimentation encadrée.
Cette hostilité n’est pas nouvelle. Depuis plusieurs années, les pouvoirs publics algériens manifestent une méfiance tenace envers les transformations numériques. L’absence de stratégie claire en matière de blockchain ou de finance décentralisée témoigne d’une volonté de préserver un modèle économique étatisé, centré sur le contrôle et la centralisation. L’innovation y est perçue davantage comme une menace que comme une opportunité.
Alors que plusieurs pays du continent, comme le Nigéria, le Maroc ou l’Afrique du Sud, expérimentent des monnaies numériques de banque centrale (MNBC) ou des régulations souples, l’Algérie persiste dans son repli. Cette décision l’éloigne des dynamiques africaines de transformation numérique et l’empêche de prendre part à des initiatives continentales dans les domaines de la fintech, de la traçabilité ou des transferts de fonds transfrontaliers.
Les conséquences sont lourdes pour les acteurs algériens de l’innovation. Start-up, chercheurs, entrepreneurs ou particuliers sont désormais exposés à des sanctions s’ils s’intéressent aux cryptomonnaies. Ce verrouillage freine le développement d’un écosystème local, alors que le pays aurait pu tirer parti de ces technologies pour moderniser ses services financiers et proposer des alternatives à l’économie informelle.
Cette interdiction radicale révèle une vision économique figée, peu en phase avec les défis du XXIe siècle. À l’heure où l’Afrique ambitionne de bâtir ses propres chaînes de valeur numériques, la stratégie algérienne illustre un refus d’adaptation face à des mutations globales. En misant sur l’interdit plutôt que sur l’encadrement, Alger semble condamner son économie à un isolement technologique durable.