Le 27 juin 2025, les autorités maliennes ont acté le transfert de la totalité des actions des sociétés minières Yatéla S.A. et Morila S.A. à la Société publique SOREM S.A., créée en 2022. Par cette décision, le gouvernement reprend officiellement le contrôle de deux anciens piliers de l’exploitation aurifère nationale, jusqu’ici en grande partie détenus par des intérêts étrangers.
Ce transfert fait suite à plusieurs négociations entamées dès 2024 avec les partenaires étrangers. La mine de Yatéla, arrêtée depuis 2016, était détenue à 80 % par Sadiola Exploration Limited, composée notamment d’AngloGold Ashanti et IAMGOLD. L’accord de cession signé en octobre 2024 a permis à l’État d’acquérir l’ensemble des parts, avec à la clé une contribution financière de 40 millions de dollars couvrant les obligations fiscales et les frais de réhabilitation. Quant à Morila, autre site majeur, elle avait été rachetée en 2020 par l’australienne Firefinch, qui s’en est retirée en 2023, après des difficultés opérationnelles.
Ces deux mines, bien qu’aujourd’hui inactives ou sous-performantes, ont longtemps été stratégiques. Morila, à son apogée, produisait jusqu’à 600 000 onces d’or par an. Leur passage sous le contrôle de SOREM intervient dans un contexte de recentrage de la politique minière malienne autour d’acteurs publics. Le Mali, où l’or représente 70 % des exportations, cherche à limiter sa dépendance vis-à-vis de partenaires étrangers, tout en reprenant la main sur des gisements historiquement rentables.
À ce stade, aucune projection officielle de relance n’a été rendue publique. Les mines restent pour l’instant inactives, sans gouvernance opérationnelle. L’objectif annoncé est de restaurer la continuité juridique, technique et environnementale. La reprise de ces actifs pourrait, à terme, renforcer les recettes de l’État, mais dépendra de la capacité de SOREM à mobiliser les investissements nécessaires et à relancer des infrastructures vieillissantes ou dégradées.
La création de SOREM S.A. répond à une volonté politique claire : mieux contrôler l’exploitation, la transformation et la commercialisation des ressources minières nationales. En plus des sites miniers, SOREM supervise également des projets structurants comme la future raffinerie aurifère de Sénou, dont les travaux ont été lancés le 16 juin 2025. Cette centralisation marque une rupture avec les pratiques antérieures de partenariats dominés par les multinationales.
Le retour de Morila dans le giron public ne s’est pas fait sans contrepartie. En acceptant l’abandon des actifs contre un dollar symbolique, l’État a dû reprendre deux dettes importantes de Firefinch, totalisant plus de 125 millions de dollars. Cette absorption pourrait peser lourd sur les finances publiques si aucune stratégie de valorisation rapide n’est mise en place. Ce choix illustre aussi la complexité des désengagements d’acteurs privés étrangers, souvent accompagnés de passifs financiers et environnementaux.