Le gouvernement nigérian a intenté une action en justice contre la plateforme d’échange de cryptomonnaies Binance, lui réclamant un montant total de 81,5 milliards de dollars. Cette somme comprend 79,5 milliards de dollars pour des pertes économiques attribuées aux activités de Binance et 2 milliards de dollars d’arriérés fiscaux. Cette poursuite s’inscrit dans un contexte de tensions croissantes entre les autorités nigérianes et les acteurs du marché des cryptomonnaies, accusés de contribuer à la dévaluation rapide du naira, la monnaie locale.
Les autorités fiscales nigérianes, notamment la Federal Inland Revenue Service (FIRS), estiment que Binance opère dans le pays sans enregistrement officiel et enfreint la législation fiscale en vigueur. Elles l’accusent de ne pas payer la TVA et l’impôt sur les sociétés, et d’être impliquée dans l’évasion fiscale de ses utilisateurs. Cette accusation s’accompagne d’une demande de pénalité annuelle de 10% sur les montants dus, ainsi que d’un taux d’intérêt de 26,75%, selon le taux directeur de la Banque centrale du Nigeria.
Le contentieux entre le Nigeria et Binance se déroule dans un climat de crise économique marquée par une chute de plus de 40% de la valeur du naira par rapport au dollar en un an. Les autorités accusent les plateformes de cryptomonnaies de jouer un rôle clé dans cette dévaluation en facilitant la spéculation sur la devise nationale. En mars 2024, Binance a suspendu ses transactions en naira, sous la pression réglementaire, mais cela n’a pas suffi à calmer les inquiétudes du gouvernement nigérian.
L’issue de ce conflit pourrait avoir des répercussions majeures sur l’écosystème des cryptomonnaies au Nigeria, un pays où l’adoption des cryptomonnaies est particulièrement élevée. Les autorités cherchent à contrôler le marché des cryptomonnaies, tout en limitant la volatilité du naira, mais elles se heurtent à un secteur en pleine expansion. Si les poursuites fiscales contre Binance se poursuivent, d’autres plateformes pourraient se voir contraintes de se conformer à une régulation plus stricte, ce qui pourrait affecter l’accès aux cryptomonnaies pour de nombreux Nigérians.
Le Nigeria est l’un des leaders mondiaux en matière d’adoption des cryptomonnaies. Une étude de 2023 révèle que 42% des Nigérians interrogés en ligne ont utilisé des cryptomonnaies, et le pays se classe deuxième au monde dans l’indice mondial d’adoption des cryptomonnaies 2024. Cette popularité des cryptomonnaies est alimentée par une population qui cherche des alternatives face à l’effondrement du naira. Pour beaucoup, les cryptomonnaies représentent une bouée de sauvetage économique, surtout dans un contexte d’inflation galopante.
Cependant, cette adoption massive des cryptomonnaies complique la tâche des autorités nigérianes, qui tentent d’établir une régulation adéquate tout en freinant l’impact de la volatilité sur l’économie. Le gouvernement a intensifié ses efforts pour freiner les opérations non régulées, mais l’effort pour imposer un cadre légal aux cryptomonnaies pourrait se heurter aux résistances du marché. Le règlement des différends fiscaux entre Binance et le Nigeria pourrait marquer le début d’une série de mesures de régulation sur le secteur des cryptomonnaies, avec des conséquences importantes pour l’avenir économique du pays.