La Cour constitutionnelle du Mali a rejeté une demande visant à destituer le président de la Transition, le général Assimi Goïta, invoquant son incompétence à statuer en l’absence d’un Parlement élu. L’arrêt, rendu le 18 juin 2025 et publié au Journal officiel le 23 juin, bloque toute initiative de mise en accusation dans le cadre de la transition actuelle.
À l’origine de la procédure, une requête déposée par un citoyen malien, Saïdou dit Cheickna Diallo, qui reprochait au chef de l’État d’avoir violé son serment présidentiel, constituant selon lui un acte de « haute trahison ». Il se fondait sur l’article 73 de la Constitution promulguée en juillet 2023, qui prévoit la destitution du président par un vote aux trois quarts du Parlement réuni en Congrès. Mais sans institution parlementaire conforme à cette disposition, la démarche était juridiquement inopérante.
Depuis la dissolution de l’Assemblée nationale à la suite du coup d’État de 2020, le pouvoir législatif malien est exercé par le Conseil national de Transition (CNT), une structure créée par les autorités militaires pour remplacer temporairement le Parlement. La Cour a estimé que ce Conseil ne pouvait être assimilé à un organe constitutionnellement légitime pour initier une procédure de destitution, confortant ainsi l’exceptionnalité du régime actuel.
Ce rejet souligne une nouvelle fois l’impasse institutionnelle dans laquelle se trouve le Mali. Tant que les élections législatives ne sont pas organisées et qu’un Parlement élu ne siège pas, aucun mécanisme constitutionnel ne permet de contrôler ou de contester légalement le pouvoir exercé par le président de la Transition. La prolongation de la transition, sans échéancier clair, renforce ce blocage démocratique.
Ce n’est pas la première fois que la Cour constitutionnelle malienne se retrouve à valider l’exception plutôt que la norme. En mai 2021, après le renversement de Bah N’Daw et la reprise en main du pouvoir par Assimi Goïta, la même juridiction avait entériné la nouvelle configuration du pouvoir, justifiant son arrêt par l’absence d’alternatives légales. L’institution semble ainsi accompagner le pouvoir militaire plutôt que d’en garantir la conformité au droit.
L’arrêt du 18 juin 2025 illustre les limites d’un système transitoire sans institutions élues ni contre-pouvoirs effectifs. Dans ce cadre, la justice constitutionnelle devient un acteur de stabilisation du régime, mais au prix d’une marginalisation du droit commun. Faute de Parlement, le principe même de responsabilité du chef de l’État est suspendu, laissant les citoyens sans recours institutionnel. Un vide démocratique qui interroge sur la sincérité et l’avenir du retour à l’ordre constitutionnel promis par la junte.