Le Tribunal de Grande instance de la Commune 1 de Bamako a suspendu, lundi 25 août, l’application du décret présidentiel qui avait dissous tous les partis et organisations politiques au Mali. Cette décision redonne temporairement une base légale aux formations politiques, en attendant que la justice se prononce définitivement sur la conformité de la mesure.
Le décret, signé le 13 mai 2025, interdisait toute activité des partis et prévoyait des sanctions en cas de violation. En réponse, plusieurs formations avaient saisi la justice, contestant la légalité et la constitutionnalité de la dissolution. Le tribunal a retenu l’exception d’inconstitutionnalité soulevée par les requérants et a transmis le dossier à la Cour suprême, qui pourrait à son tour le renvoyer à la Cour constitutionnelle. En attendant, l’exécution de la mesure est suspendue.
La dissolution des partis s’inscrivait dans une série de réformes menées par les autorités de transition, justifiées par la volonté de « rationaliser » un paysage politique jugé trop éclaté. Cette décision faisait suite à l’abrogation des lois encadrant la charte des partis et le statut de l’opposition, votée par le Conseil national de transition le 12 mai 2025. Elle avait toutefois suscité une levée de boucliers, au Mali comme à l’international, dénonçant une restriction des libertés politiques et un renforcement du pouvoir du gouvernement de transition.
La décision du tribunal ne met pas fin au bras de fer. D’autres procédures sont en cours devant différentes juridictions de Bamako, dont un dossier attendu le 24 septembre devant le Tribunal de la Commune VI. La Section administrative de la Cour suprême est également saisie, mais n’a pas encore enregistré de réponse du gouvernement. En parallèle, les autorités ont annoncé qu’une nouvelle loi sur les partis politiques serait élaborée dans les prochains mois, en application des recommandations des assises nationales de 2021.
Cette suspension judiciaire n’efface pas les inquiétudes. Les manifestations récentes ont mis en lumière la méfiance d’une partie de la population face à la concentration des pouvoirs entre les mains du gouvernement de transition. De leur côté, les avocats des partis dissous affirment avoir lancé une procédure visant deux membres du Conseil national de transition devant le Pôle national de lutte contre la cybercriminalité, un dossier qui peine à avancer. L’affaire illustre ainsi les tensions entre volonté de refondation de l’État et accusations de dérive autoritaire.