Depuis le 3 mars, quatre États du nord du Nigeria, dont Kano, ont pris la décision de fermer toutes leurs écoles publiques et privées pendant le mois de ramadan. Cette mesure touche environ 11,5 millions d’élèves, qui sont donc exclus du calendrier scolaire national durant cette période. Le débat autour de cette fermeture se concentre sur les implications éducatives et religieuses d’une telle décision.
La fermeture des écoles pendant le ramadan a été imposée par les gouverneurs des États de Kano, Katsina, Bauchi et Kebbi. Si la décision se base sur des considérations religieuses, elle a provoqué une forte réaction. L’Association nationale des étudiants nigérians a lancé un ultimatum de 72 heures aux autorités locales, dénonçant cette fermeture comme une violation des droits des élèves à une éducation continue et non perturbée. Pour les étudiants et leurs familles, cette mesure représente un défi important, non seulement en termes d’organisation de la scolarité, mais aussi pour l’accès à l’éducation dans un pays où l’éducation est déjà un enjeu majeur.
Le mois de ramadan est l’un des cinq piliers de l’islam, observé par la majorité des Nigérians, en particulier dans le nord du pays. La Constitution nigériane attribue aux gouverneurs des États la gestion des écoles en concertation avec le ministère de l’Éducation, ce qui leur donne la latitude de prendre de telles décisions. Dans cette région du Nigeria, la loi islamique coexiste avec la législation républicaine, et plusieurs États appliquent des règles religieuses en complément des lois nationales. Cette dualité législative rend le pays particulièrement sensible aux tensions entre les différents groupes religieux.
L’une des conséquences potentielles de cette décision pourrait être une fragmentation encore plus marquée du système éducatif nigérian, où les disparités régionales sont déjà visibles. Les élèves du nord du pays risquent d’être pénalisés par cette interruption prolongée, tandis que ceux du sud continueront leur scolarité sans interruption. Cette disparité pourrait exacerber les inégalités entre les différentes régions du pays, notamment en matière d’accès à l’éducation.
La situation a également été dénoncée par des voix chrétiennes au Nigeria, dont celle de l’archevêque Daniel Okoh, président de l’Association des chrétiens du Nigeria. Il a lancé un appel à un dialogue impliquant les responsables religieux, les éducateurs et les parents, afin de trouver une solution consensuelle qui prenne en compte à la fois les impératifs religieux et les besoins éducatifs des élèves. Cette initiative reflète les tensions interreligieuses qui existent dans le pays, où musulmans et chrétiens cohabitent dans un contexte de diversité religieuse complexe.
D’un côté, Muric, une organisation défendant les droits des musulmans, a soutenu fermement cette décision. Son directeur, Ishaq Akintola, a souligné que le ramadan est une question purement musulmane, excluant selon lui toute interférence d’autres croyances. D’un autre côté, le sultan de Sokoto, la plus haute autorité musulmane du pays, reste pour l’instant silencieux sur la question, alors que les écoles continuent de fonctionner dans son État. Ce silence met en lumière la diversité des approches concernant l’intégration des pratiques religieuses dans la gestion publique, notamment dans les zones à majorité musulmane.