Pour la première fois depuis plus de six mois, l’Ouganda a rouvert plusieurs postes-frontières avec la République démocratique du Congo (RDC), notamment ceux de Bunagana, Ishasha et Busanza. Ces points de passage, fermés pour des raisons sécuritaires, se trouvent à proximité de zones occupées par les rebelles du Mouvement du 23 mars (M23), encore actifs dans la région du Nord-Kivu.
Ces frontières, situées dans l’est de la RDC, sont cruciales pour les échanges commerciaux et la circulation des personnes entre les deux pays. Leur fermeture, intervenue en janvier dernier, avait été justifiée par la montée des tensions liées à la présence persistante du M23, qui contrôle toujours plusieurs localités dans le Rutshuru. En rouvrant ces points, Kampala semble vouloir apaiser les tensions régionales, sans pour autant annoncer de retrait militaire ou d’évolution sur le terrain congolais.
Depuis sa résurgence en 2021, le M23, soutenu selon Kinshasa par le Rwanda, occupe plusieurs territoires stratégiques dans l’est congolais, provoquant le déplacement de centaines de milliers de civils. L’Ouganda, tout en niant tout soutien direct au groupe, a renforcé sa coopération militaire avec la RDC dans le cadre des opérations conjointes contre les ADF (Forces démocratiques alliées), autre groupe armé opérant dans la région. Cette réouverture intervient alors que les tensions diplomatiques entre la RDC et ses voisins restent vives.
La décision ougandaise semble motivée à la fois par la nécessité de relancer les échanges transfrontaliers et par la volonté de stabiliser les zones frontalières. Les commerçants locaux et les populations riveraines, lourdement affectés par la fermeture des postes, ont accueilli cette annonce avec soulagement. Reste à savoir si cette ouverture sera durable, compte tenu de l’instabilité persistante dans le Rutshuru.
À Kinshasa, l’annonce n’a pas été officiellement commentée. Mais sur le terrain, des responsables locaux congolais s’interrogent sur le timing de la décision ougandaise, alors que la situation militaire n’a pas significativement évolué. Certains y voient une mesure unilatérale, sans véritable coordination avec les autorités congolaises, ce qui pourrait compliquer davantage la gestion du conflit dans cette région déjà fragmentée.
La réouverture des postes-frontières pourrait s’inscrire dans une stratégie ougandaise de normalisation progressive de ses relations avec la RDC, en dépit de la complexité du dossier sécuritaire. Elle pourrait aussi répondre à des logiques internes, Kampala étant soucieuse de réduire l’impact économique de la fermeture prolongée de ces points de passage. Mais sans solution politique à la crise du M23, cette initiative restera fragile.