Une décision rendue par la Cour supérieure du Québec ce mardi confirme que le profilage racial est un problème « systémique » au sein du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM). Le juge Dominique Poulin a conclu que la Ville de Montréal devait être tenue responsable des pratiques discriminatoires de son service de police, notamment à l’encontre des communautés racisées.
Cette décision fait suite à un recours collectif de 171 millions de dollars déposé par la Coalition noire du Québec et Alexandre Lamontagne, un homme noir qui avait été impliqué dans une altercation nocturne avec la police en 2017. Bien que le jugement ne précise pas encore clairement le montant que la Ville devra payer, il marque une avancée importante pour les plaignants, qui y voient une reconnaissance officielle de la discrimination subie.
Le contexte de cette affaire remonte à une enquête de 2019 qui révélait que les personnes autochtones et noires étaient quatre à cinq fois plus susceptibles que les Blancs d’être arrêtées par la police de Montréal. Ce recours collectif visait à indemniser les personnes ayant été victimes de profilage racial entre août 2017 et janvier 2019, avec une demande initiale de 5 000 dollars par personne pour les préjudices subis.
Bien que le juge ait partiellement accepté cette demande, il a précisé que certaines victimes devront prouver leurs cas individuellement pour recevoir une indemnisation. Le jugement distingue également différents types de victimes et des montants de compensation variés, en fonction des circonstances spécifiques des interactions avec la police. Par exemple, les personnes dont les informations personnelles ont été enregistrées après des contrôles policiers injustifiés recevront 5 000 dollars, tandis que celles sans enregistrement d’informations ne pourront recevoir que 2 500 dollars.
Malgré ces nuances, cette décision est saluée comme une victoire symbolique majeure par les avocats des plaignants. Mike Diomande, avocat de la Coalition noire du Québec, souligne que l’essentiel du jugement est la reconnaissance du profilage racial et de la discrimination par la police de Montréal, un fait qui ouvre la voie à d’éventuelles réformes au sein de la SPVM.
Toutefois, il reste des zones d’ombre quant à la distribution exacte des compensations et au nombre de personnes qui pourront effectivement en bénéficier. La juge a encouragé les deux parties à collaborer pour définir les modalités de paiement et le processus de réclamation individuelle. Bien que les avocats de la ville aient tenté de contester la méthodologie utilisée dans l’étude sur le profilage racial, le juge a jugé les données suffisamment fiables pour guider l’attribution des compensations.
Cette décision pourrait devenir une étape clé dans la lutte contre les abus policiers à Montréal et servir de précédent pour d’autres juridictions. Cependant, il faudra suivre de près les négociations à venir entre la Ville de Montréal et les victimes afin de clarifier les montants et les modalités de distribution des fonds alloués.