Le 8 mai 1945 marque la fin des combats en Europe, avec la capitulation de l’Allemagne nazie, un tournant majeur de la Seconde Guerre mondiale. Cependant, cette victoire, célébrée aujourd’hui par les nations occidentales, a également impliqué un nombre considérable de combattants africains, qui ont joué un rôle crucial dans l’issue du conflit. Près de 500 000 soldats issus des colonies françaises et britanniques ont participé à cette bataille pour la liberté, et leur contribution a jeté les bases des mouvements de décolonisation qui ont marqué le XXe siècle.
Dans les rangs de l’armée française, environ 10 % des effectifs étaient composés de troupes africaines, maghrébines et malgaches, représentant une force significative dans les combats. Parmi ces hommes, 179 000 tirailleurs sénégalais ont été mobilisés, dont 40 000 engagés directement dans les combats. Les Maghrébins, quant à eux, représentaient 320 000 soldats, et tous ont combattu aux côtés des troupes françaises et britanniques contre l’armée nazie. Bien que leur rôle ait été primordial, ces soldats ont dû faire face à des traitements discriminatoires, tant sur le terrain que dans leur reconnaissance après-guerre.
La Seconde Guerre mondiale s’inscrit dans un contexte politique particulier pour les colonies africaines. Le général de Gaulle, après la défaite de la France en 1940, appelle à la résistance, et c’est depuis le Tchad que les premières victoires militaires de la France libre se dessinent. Ce territoire, dirigé par Félix Eboué, devient un point stratégique essentiel dans la lutte contre l’Axe, marquant également l’implication des colonies dans la guerre. Parallèlement, les troupes africaines et malgaches, souvent reléguées à des rôles subalternes par les Alliés, se retrouvent également en première ligne lors des combats décisifs en Italie et en France.
La participation de ces soldats à la victoire alliée a eu des répercussions profondes sur les mouvements de décolonisation. Bien qu’ils aient combattu pour la liberté et les droits universels, beaucoup de ces combattants se sont retrouvés confrontés à des promesses non tenues. En 1945, une répression violente d’une manifestation indépendantiste à Sétif, en Algérie, a marqué la déception de ces soldats, qui s’étaient battus pour une émancipation qui n’est jamais venue. Ce contraste entre la guerre pour la liberté et la persistance de l’injustice a accéléré les revendications indépendantistes dans de nombreuses colonies.
Au total, plus de 21 500 Africains et Malgaches ont perdu la vie sous les uniformes français, et plus de 16 600 Maghrébins sont tombés lors des combats. Dans le même temps, les soldats africains, tout en faisant preuve d’un courage exceptionnel, ont également été écartés des premières lignes de l’armées par les exigences raciales des alliés, notamment les Américains. La fin de la guerre a fait naître un sentiment de trahison parmi de nombreux anciens combattants, dont plusieurs, tels qu’Ahmed Ben Bella, futur leader algérien, ont été à l’avant-garde des mouvements de décolonisation. Pour la Grande-Bretagne, plus de 500 000 Africains ont également été mobilisés, principalement dans les forces britanniques en Afrique de l’Est, au Moyen-Orient et en Asie, renforçant encore le rôle de l’Afrique dans l’issue de la guerre.
L’histoire de la participation africaine à la Seconde Guerre mondiale est souvent oubliée dans les récits traditionnels de cette époque. Pourtant, le rôle des soldats africains a été déterminant non seulement dans la victoire contre le nazisme, mais aussi dans les luttes pour l’indépendance qui ont secoué l’empire colonial français et d’autres puissances européennes dans les décennies suivantes. Aujourd’hui, cette mémoire reste un sujet de débat et de réexamen, à la fois dans les anciennes métropoles coloniales et sur le continent africain, où de plus en plus de voix demandent reconnaissance et justice pour ces héros oubliés.