Le 10 mars 2025, le journaliste tchadien Olivier Monodji, directeur de publication de l’hebdomadaire Le Pays, a été placé sous mandat de dépôt après avoir été inculpé pour des charges graves, dont “intelligence avec une puissance étrangère”. Cette incarcération fait suite à son arrestation le 5 mars à N’Djaména, où il a été placé en garde à vue sans explication claire. Monodji, également correspondant pour Radio France Internationale (RFI), est désormais l’une des quatre personnes accusées dans cette affaire, qui inclut des journalistes et des fonctionnaires.
Les accusations portées contre Olivier Monodji sont lourdes. Après plusieurs jours de garde à vue, le journaliste a appris, le 10 mars, les faits qui lui sont reprochés. Selon le procureur de la République près le Tribunal de grande instance (TGI) de N’Djaména, Monodji et ses co-accusés auraient fourni des informations sensibles concernant la sécurité et l’économie du Tchad à une “puissance étrangère”, bien que l’identité de celle-ci n’ait pas été précisée. Ces accusations sont liées à des documents qui auraient été obtenus par la justice tchadienne et qui sont supposés prouver l’implication des accusés dans des activités compromettantes pour la souveraineté nationale.
Le climat politique au Tchad est marqué par une répression croissante à l’encontre de la liberté de la presse. Ce type d’incident survient dans un contexte où les autorités ont multiplié les actions visant à contrôler les voix dissidentes et les médias indépendants. L’arrestation de Monodji intervient alors que le pays, dirigé par Mahamat Idriss Déby, cherche à maintenir son autorité et à gérer des tensions internes, notamment liées à des revendications politiques et à la sécurité, notamment dans le cadre des luttes contre les groupes armés. L’arrestation de ce journaliste, également connu pour ses reportages critiques, fait ainsi figure de symbole dans cette guerre contre l’information.
L’incarcération de Monodji soulève des questions cruciales concernant la liberté de la presse et les droits de l’homme au Tchad. Si le journaliste est reconnu coupable des charges qui pèsent contre lui, il pourrait écoper de 20 à 30 ans de prison. Cette situation risque d’intensifier la répression contre les journalistes et d’amplifier la censure des médias indépendants. Toutefois, certains observateurs estiment qu’une mobilisation internationale pourrait contraindre le gouvernement tchadien à réexaminer la gravité des accusations et à libérer Monodji, en vertu du principe fondamental de la liberté d’expression.
La défense d’Olivier Monodji se positionne contre les accusations portées à l’encontre de son client. Selon son avocat, Me Amos Allahta, les preuves matérielles présentées par la justice se limitent à des coupures de presse publiées sur le site de Le Pays, des documents à caractère publicitaire qui ne justifient pas une implication dans des activités de complot ou d’intelligence avec l’ennemi. Ce manque de preuves tangibles renforce les soupçons d’une instrumentalisation de la justice à des fins politiques, visant à faire taire les voix critiques du pouvoir en place.
L’affaire Monodji représente un tournant pour le journalisme tchadien. Depuis plusieurs années, les journalistes du pays vivent sous pression constante, face à des menaces, des intimidations et des arrestations fréquentes. Cet épisode renforce la crainte parmi les médias indépendants, qui voient leurs marges de manœuvre se réduire davantage. Dans ce contexte, l’arrestation d’Olivier Monodji pourrait avoir un effet dissuasif sur la presse tchadienne, fragilisant encore plus la liberté d’expression dans le pays. Pour les organisations de défense des droits de l’homme, cette situation illustre la détérioration continue de l’État de droit au Tchad.