Dans un message audio adressé à ses partisans, l’ancien président gambien Yahya Jammeh, exilé en Guinée équatoriale depuis 2017, a annoncé son intention de revenir dans son pays. À la tête de la Gambie pendant 23 ans, ce dernier promet de reprendre la direction de son parti, l’Alliance patriotique pour la réorientation et la construction (APRC), et de défier ses opposants.
Dans cet enregistrement d’une trentaine de minutes, Yahya Jammeh a adopté un ton défiant et déterminé. Déclarant vouloir réorganiser son parti, il a critiqué les autorités gambiennes et la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao), qui prépare la mise en place d’un tribunal spécial pour juger les crimes commis sous son régime. « Je vais revenir, que ça leur plaise ou non », a-t-il martelé, tout en adressant un message direct à ses adversaires politiques.
Arrivé au pouvoir en 1994 à la suite d’un coup d’État, Yahya Jammeh a dirigé la Gambie avec une poigne de fer jusqu’à sa défaite électorale en 2016 face à Adama Barrow. Son règne a été marqué par de graves violations des droits de l’homme, notamment des disparitions forcées, des tortures et des exécutions extrajudiciaires. Ces abus ont conduit à la création d’une commission de vérité en 2018, dont les recommandations incluent des poursuites judiciaires contre 70 personnes, y compris Jammeh.
La Cédéao travaille à l’établissement d’un tribunal spécial pour juger les crimes de l’ère Jammeh. Toutefois, l’absence d’accord d’extradition entre la Guinée équatoriale, où il est exilé, et la Gambie complique les efforts visant à le traduire en justice. Malgré cela, les défenseurs des droits humains et les victimes espèrent que cette initiative entraînera une coopération accrue entre les États membres pour rendre justice.
Malgré son exil, Yahya Jammeh conserve une base de partisans fidèles en Gambie, qui voient en lui un leader fort. Cette influence s’est traduite par un soutien continu à l’APRC, qui joue encore un rôle dans la politique nationale. Sa promesse de retour pourrait cependant intensifier les tensions dans le pays, déjà marqué par des divisions politiques profondes.
Le retour annoncé de Yahya Jammeh pose un dilemme pour le gouvernement actuel d’Adama Barrow. D’un côté, Barrow est sous pression pour respecter les recommandations de la commission de vérité, et de l’autre, il doit gérer une situation politique fragile où les tensions peuvent rapidement s’enflammer. L’annonce de Jammeh pourrait donc être le prélude à un nouvel épisode de confrontation politique et juridique en Gambie.