Trois mois après la chute de Bukavu aux mains de l’AFC/M23, le gouverneur du Sud-Kivu, Jean-Jacques Purusi, est réapparu publiquement à Uvira, à 120 kilomètres du chef-lieu désormais occupé. Devant une foule réunie, il a appelé à l’unité et à la résistance, assurant que la fin du conflit était proche et que l’intégrité du pays serait préservée.
Accompagné d’un message d’espoir attribué au président Félix Tshisekedi, le gouverneur a dénoncé la vente illégale de biens publics à Bukavu et assuré que « la guerre est quasiment finie ». Il a félicité la population pour sa résilience, tout en saluant les efforts militaires pour reprendre le contrôle du territoire. Purusi a également mis en garde contre les divisions internes, en évoquant les détournements de fonds au sein des forces armées et des groupes d’autodéfense.
Depuis la prise de Bukavu, la province du Sud-Kivu est plongée dans une instabilité croissante. Les tensions se multiplient entre l’armée congolaise (FARDC) et ses alliés les Wazalendo, sur fond de soupçons de corruption. Dans le même temps, les affrontements se poursuivent avec des groupes armés tels que Twirwaneho, Red Tabara, Gumino ou Android, désormais alliés à l’AFC/M23. La semaine dernière, un officier de la 11e brigade a d’ailleurs été signalé en fuite après avoir disparu avec des ressources militaires, nourrissant les accusations de dysfonctionnement au sein de l’armée.
Pour de nombreux acteurs locaux, le retour de Jean-Jacques Purusi constitue un symbole fort. Byamungu Shamamba, figure influente de la société civile à Uvira et Fizi, y voit une occasion de rétablir la confiance entre la population et les autorités. Il plaide pour une remobilisation des forces loyales et une coordination renforcée sur le terrain. Mais cet optimisme reste teinté de prudence, tant les divisions internes affaiblissent la cohésion des forces loyalistes.
Au-delà des combats armés, le gouverneur a pointé du doigt les risques de trahison et de tribalisme, évoquant des poursuites à venir contre ceux qui auraient collaboré avec l’ennemi ou profité du chaos pour s’enrichir. Ces accusations, dans un contexte déjà marqué par la méfiance entre factions armées et pouvoir civil, pourraient raviver les tensions internes au sein même du camp gouvernemental.
Alors que Bukavu reste sous le contrôle de l’AFC/M23 et de ses alliés, le retour du gouverneur à Uvira est surtout symbolique. Aucun calendrier précis de reconquête n’a été annoncé, et l’état-major reste discret sur ses intentions stratégiques. La question centrale demeure : les forces congolaises sauront-elles surmonter leurs divisions internes pour reprendre l’initiative face à un adversaire mieux organisé et toujours actif sur le terrain ?