Le président de la Transition, le général Assimi Goïta, a lancé ce 16 juin à Bamako les travaux de construction de la raffinerie d’or SOROMA-SA, fruit d’un partenariat stratégique entre l’État malien et la société russe Yadran. Cette infrastructure doit permettre au Mali de transformer localement sa production aurifère, jusque-là entièrement exportée à l’état brut.
Implantée sur un terrain de 5 hectares à proximité de l’aéroport de Bamako, la raffinerie aura une capacité annuelle de 200 tonnes, soit quatre fois la production actuelle du pays. Cette montée en puissance repose sur le nouveau Code minier malien, qui impose désormais la transformation locale des ressources. Le capital social de SOROMA-SA s’élève à 600 millions F CFA, dont 62 % détenus par l’État malien. Au-delà de la production, l’objectif est clair : créer des emplois, améliorer les recettes fiscales et donner au Mali un accès direct aux marchés internationaux grâce à des certifications reconnues, comme celle de la LBMA (London Bullion Market Association).
Ce projet s’inscrit dans une politique plus large de souveraineté économique adoptée depuis l’arrivée au pouvoir des militaires en 2021. En plus de SOROMA-SA, le partenariat avec Yadran prévoit aussi la construction d’une usine de transformation de coton et la mise en place d’un mécanisme de sécurisation des importations de produits pétroliers. Ces initiatives illustrent la volonté du régime de diversifier ses alliances internationales, notamment vers la Russie, et de mieux contrôler ses chaînes de valeur stratégiques.
La raffinerie devrait être achevée d’ici décembre 2026. Le ministre de l’Économie et des Mines, pointant l’urgence d’industrialiser la filière aurifère, a exigé le respect strict des délais et un engagement sans faille des partenaires techniques. Le succès du projet dépendra toutefois de sa capacité à obtenir les certifications internationales indispensables à l’exportation d’or raffiné et à séduire les marchés.
L’initiative malienne s’aligne sur une tendance régionale : plusieurs pays d’Afrique de l’Ouest – Burkina Faso, Niger, Guinée – ont eux aussi lancé des réformes pour forcer la transformation locale des ressources minières. Le lancement de la mine de lithium de Goulamina en janvier 2025 avait déjà marqué une étape dans cette stratégie de diversification économique. SOROMA-SA vient ainsi renforcer une dynamique régionale qui vise à sortir du modèle extractif brut.
Fondée en 2008, la société russe Yadran est active dans plusieurs secteurs (pétrole, construction, fintech, blockchain). Sa collaboration avec le Mali ne se limite donc pas à l’or. En octobre 2024, une délégation dirigée par Irek Salikhov avait rencontré le président Goïta pour poser les bases techniques de cette coopération. À l’international, Yadran mise sur une stratégie intégrée dans le secteur énergétique et multiplie ses investissements industriels en Afrique.
Avec un potentiel estimé à près de 950 millions de dollars de plus-value annuelle, la raffinerie pourrait représenter un levier majeur pour les finances publiques maliennes. Mais cette ambition se heurte à des obstacles de taille : sans certification LBMA, l’or raffiné resterait cantonné aux marchés africains. S’ajoute à cela la fragilité politique et sécuritaire du Mali et de la région sahélienne, qui pourrait compromettre la pérennité du projet si elle n’est pas stabilisée.