La Chambre d’accusation du tribunal de grande instance de N’Djamena a rejeté, le 19 juin, la demande de mise en liberté provisoire de l’opposant Succès Masra. Malgré les arguments avancés par ses avocats, l’ancien Premier ministre et président du parti Les Transformateurs reste incarcéré.
Saisie le 19 mai par la défense, qui dénonçait l’illégalité de son arrestation, la Chambre a certes reconnu la recevabilité formelle de la requête, mais l’a rejetée sur le fond. « La Chambre a préféré ignorer les moyens juridiques présentés », a déclaré Me Kadjilembaye Francis, porte-parole du collectif des avocats, exprimant sa déception face à une décision perçue comme politique.
Arrêté à son domicile à N’Djamena le 16 mai, Succès Masra est poursuivi pour incitation à la haine, révolte, complicité et assassinat en lien avec les violences survenues dans le canton Mandakaou. Ces accusations, graves et encore en phase d’instruction, interviennent dans un climat politique tendu, à quelques mois d’échéances électorales sensibles. Masra, figure montante de l’opposition, avait été nommé Premier ministre de transition avant de se retirer et de reprendre ses activités d’opposant.
Ce maintien en détention s’inscrit dans une dynamique de répression accrue contre les figures critiques du pouvoir. Depuis le retour de Mahamat Idriss Déby à la présidence, plusieurs opposants ont été arrêtés, exilés ou empêchés de s’exprimer. La procédure contre Masra semble s’inscrire dans cette logique, selon ses proches, qui évoquent une instrumentalisation de la justice à des fins politiques.
La défense entend poursuivre ses recours et pourrait saisir d’autres juridictions, y compris internationales, pour contester cette détention qu’elle juge arbitraire. En parallèle, les appels à la mobilisation se multiplient dans les rangs de l’opposition, même si les autorités renforcent leur contrôle sécuritaire dans la capitale.
Le sort de Succès Masra dépasse désormais le cadre judiciaire. Il incarne le sort réservé à une opposition qui tente d’exister dans un espace politique verrouillé. Sa détention prolongée risque d’exacerber les tensions internes, alors que le pays peine à construire un consensus autour de la transition politique engagée depuis 2021.