Le 27 juin, la République démocratique du Congo et le Rwanda ont signé à Washington un accord sous médiation américaine, visant à neutraliser les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), un groupe armé hutu actif à l’est de la RDC. Mais ce texte, salué comme un pas vers l’apaisement régional, ignore les principales parties prenantes du conflit : les rebelles du M23 et les milliers de victimes civiles, reléguées au second plan.
L’accord s’articule autour d’un calendrier serré. D’ici fin juillet, un mécanisme de coordination sécuritaire doit être mis en place pour planifier des opérations conjointes entre les armées congolaise et rwandaise. Suivront quinze jours de repérage des positions des FDLR, avant le lancement d’une phase opérationnelle de trois mois visant leur neutralisation. En échange, Kigali s’engage à retirer ses troupes déployées à titre défensif. Mais sur le terrain, la réalité est plus complexe : les FDLR sont dispersés dans des zones instables, parfois contrôlées par le M23, qui refuse toujours le désarmement. La probabilité d’un embrasement reste élevée.
Le conflit dans l’est congolais s’enlise depuis plusieurs années, alimenté par des rivalités régionales et une méfiance tenace entre Kinshasa et Kigali. Le Rwanda accuse les FDLR, héritiers des génocidaires de 1994, de menacer sa sécurité. Kinshasa, de son côté, voit dans le M23 un proxy rwandais destiné à affaiblir son autorité dans le Kivu. En 2023, une tentative de médiation angolaise pour favoriser un dialogue entre les deux camps avait échoué. L’accord de Washington s’inscrit donc dans une série d’initiatives diplomatiques dont les résultats restent limités.
Le processus reste incomplet : l’AFC/M23, dont le rôle militaire est central dans l’est du pays, n’a pas été associé aux discussions. Les négociations le concernant se poursuivent à Doha, au Qatar, mais sont dans l’impasse. Kinshasa exige le retrait immédiat des rebelles et la restauration de son autorité sur les territoires occupés, tandis que le M23 réclame des garanties et un accord politique global. En l’absence de dialogue inclusif, tout progrès dans la région reste fragile.
L’autre angle mort du texte est l’absence de mesures concrètes en faveur des victimes. S’il mentionne le retour volontaire des personnes déplacées, aucune disposition n’est prévue pour la vérité, la justice ou la réparation. Ni accompagnement psychologique, ni mécanisme d’indemnisation. Pourtant, des personnalités comme Denis Mukwege ou le président Tshisekedi ont plusieurs fois plaidé pour une prise en compte des souffrances des civils. Ces appels n’ont, pour l’instant, pas été traduits dans les faits.
Deux mécanismes sont censés garantir l’application de l’accord : un comité conjoint de coordination militaire et une instance diplomatique de surveillance. Celle-ci devra examiner les plaintes, documenter les violations et proposer des ajustements. Mais sans mécanismes contraignants ni sanctions prévues en cas de non-respect, ces garanties restent théoriques. La durabilité de l’accord dépendra donc moins de sa forme que de la volonté politique réelle de ses signataires.