Le projet de nouvelle Constitution guinéenne, qui sera soumis à référendum le 21 septembre prochain, a été rendu public cette semaine à la télévision nationale. Parmi les principales mesures, figurent l’allongement du mandat présidentiel de cinq à sept ans, la création d’un Sénat partiellement nommé par le président et l’institution d’une Cour spéciale de justice chargée de juger le chef de l’État et les membres du gouvernement en cas de haute trahison.
Si ce texte introduit des innovations notables, il conserve cependant l’ossature des précédentes Constitutions. Le président de la transition, Mamadi Doumbouya, avait promis un texte « qui ressemble et rassemble les Guinéens ». Néanmoins, la répartition des pouvoirs reste globalement inchangée. Le Sénat, nouvellement créé, sera composé en partie de membres désignés directement par le président. La Cour spéciale de justice, quant à elle, aura pour mission de juger les plus hauts responsables de l’exécutif pour les crimes ou délits commis durant leur mandat.
Certains articles du texte suscitent néanmoins des interrogations. La création de la Cour spéciale entre en contradiction avec l’article 74, qui garantit une immunité civile et pénale aux anciens présidents pour les actes posés dans l’exercice de leurs fonctions. Cette disposition apparaît d’autant plus sensible qu’une procédure est actuellement ouverte contre l’ex-président Alpha Condé, notamment pour des crimes de sang. Ce flou juridique alimente les doutes sur la volonté réelle de rendre la justice indépendante.
Autre évolution clé : la durée du mandat présidentiel, désormais portée à sept ans, avec la possibilité d’un seul renouvellement. Ce changement, combiné à la suppression de la clause interdisant formellement plus de deux mandats dans une vie, ouvre la voie à des interprétations plus souples du nombre de mandats consécutifs. La possibilité de candidatures indépendantes est introduite, mais elle ne compense pas les craintes d’un verrouillage progressif du jeu politique.
Le gouvernement défend une version « consensuelle » du texte. Ousmane Gaoual Diallo, porte-parole du gouvernement, a expliqué que la formulation retenue sur la limitation des mandats résultait d’un accord entre parlementaires. Il s’en est remis au peuple, qui devra trancher par voie de référendum. Pourtant, l’absence d’un organe de transition légitimé par des élections pose la question de la représentativité de ce processus constituant.
Le référendum prévu en septembre constituera un moment décisif pour la transition. Il servira non seulement à valider un texte fondateur, mais aussi à mesurer la confiance réelle dont dispose le pouvoir militaire actuel. La légitimité du général Doumbouya, depuis le putsch de 2021, reste conditionnée à sa capacité à mener une transition crédible, transparente et inclusive. À défaut, ce projet pourrait renforcer la méfiance d’une partie de la population et attiser les tensions politiques latentes.