Les représentants du Burkina Faso, du Mali et du Niger ont quitté la deuxième session ordinaire du Conseil des ministres de l’UEMOA, tenue le 11 juillet à Lomé. Leur départ a été motivé par le refus opposé à la candidature burkinabè pour présider le Conseil, une fonction pourtant prévue en rotation parmi les États membres. Pour les pays de l’Alliance des États du Sahel (AES), ce rejet constitue une atteinte grave à leur souveraineté.
Selon plusieurs sources médiatiques, le Burkina Faso devait prendre la tête du Conseil des ministres pour une durée de deux ans, conformément aux principes d’alternance définis par les textes de l’UEMOA. En refusant cette passation, l’organisation serait en infraction avec ses propres règles, estiment les délégations de Ouagadougou, Bamako et Niamey. En signe de protestation, elles ont annoncé leur intention de boycotter le reste des discussions, exigeant une réforme profonde du mode de gouvernance de l’Union.
Ce nouvel épisode de tension survient dans un contexte déjà très tendu entre l’AES et les institutions régionales. Depuis leur retrait de la CEDEAO, les trois pays, dirigés par des régimes militaires, accusent les instances communautaires d’agir sous l’influence des puissances occidentales, en particulier de la France. Leur volonté de s’émanciper du franc CFA, symbole de cette dépendance monétaire, ne fait qu’envenimer les relations avec les partenaires traditionnels de la région.
L’incident de Lomé pourrait bien accélérer le désengagement de l’AES vis-à-vis de l’UEMOA. Des voix internes appellent déjà à la mise en place d’alternatives régionales, y compris une nouvelle monnaie commune. Mais cette stratégie comporte des risques : isolement économique, suspension des financements régionaux, voire instabilité financière à moyen terme. La Conférence des chefs d’État de l’UEMOA devra trancher dans les prochaines semaines, mais la fracture semble consommée.
Au-delà de la simple querelle institutionnelle, ce refus de dialogue avec la France dans la gestion monétaire traduit un rejet politique fort. Pour les dirigeants de l’AES, toute interaction sur le franc CFA sous médiation française est devenue inacceptable. Cette posture radicale, partagée entre Ouagadougou, Bamako et Niamey, témoigne d’une volonté de rupture nette avec l’ordre monétaire hérité de la colonisation.
Ce départ fracassant interpelle les autres pays de l’UEMOA, pris entre deux logiques : préserver l’unité institutionnelle ou adapter l’Union à la nouvelle réalité géopolitique sahélienne. L’AES semble déterminée à peser dans la redéfinition des équilibres régionaux. Le traitement réservé à la candidature burkinabè pourrait ainsi avoir des conséquences bien au-delà de cette session ministérielle.