Le roi Mohammed VI a ordonné l’envoi d’une aide humanitaire supplémentaire à destination de la bande de Gaza, toujours plongée dans une crise humanitaire aiguë depuis le déclenchement de la guerre. Selon un communiqué publié lundi par le ministère marocain des Affaires étrangères, ce nouveau lot comprend environ 100 tonnes de denrées alimentaires et de médicaments, destinés en priorité aux enfants et aux nourrissons. Le souverain a exigé que l’acheminement se fasse par voie aérienne afin de garantir une livraison rapide et directe.
Cette opération s’inscrit dans une série d’initiatives entreprises par Rabat depuis octobre 2023. Le Maroc a déjà expédié plusieurs centaines de tonnes de produits de première nécessité, via des convois terrestres et aériens. Contrairement à d’autres États arabes qui préfèrent canaliser leur soutien à travers des organisations internationales, le royaume privilégie une approche directe et visible. Ce choix permet d’apporter une réponse immédiate aux besoins vitaux des civils tout en renforçant la portée diplomatique de ces gestes.
L’action marocaine bénéficie d’une légitimité institutionnelle particulière, du fait de la présidence par Mohammed VI du Comité Al-Qods, organe de l’Organisation de la coopération islamique chargé de la question de Jérusalem. Rabat combine ainsi deux dimensions : un soutien humanitaire concret et une diplomatie mesurée, soucieuse de maintenir un dialogue ouvert avec l’ensemble des acteurs régionaux. Ce double positionnement distingue le Maroc dans un contexte où les postures varient entre financements massifs, médiations politiques et initiatives locales.
La gestion de la crise de Gaza illustre les divergences entre pays arabes. Le Qatar et les Émirats arabes unis concentrent leurs efforts sur le financement des agences onusiennes. L’Égypte, en raison de sa frontière avec Rafah, joue un rôle central dans la médiation et l’acheminement logistique. Le Maroc, lui, mise sur une « diplomatie humanitaire » directe, soutenue par une communication institutionnelle qui met en avant la continuité de son engagement. Cette singularité lui confère une visibilité accrue, malgré son éloignement géographique du théâtre du conflit.
En multipliant les gestes humanitaires, Mohammed VI cherche à consolider l’image du Royaume comme acteur solidaire et crédible dans le monde arabe et islamique. Cette politique a aussi une portée internationale, les partenaires étrangers percevant le Maroc comme un pays capable de conjuguer efficacité sur le terrain et discours modéré. Pour Rabat, il s’agit de capitaliser sur la valeur symbolique de la cause palestinienne, encore centrale dans l’opinion publique arabe, et d’affirmer un rôle diplomatique à part entière.
Enfin, cette initiative répond aussi aux attentes de la population marocaine et arabe, attachée à une manifestation concrète de solidarité avec Gaza. Elle illustre la volonté du souverain d’inscrire la cause palestinienne au cœur de son agenda, tout en projetant une image de leadership régional équilibré. En combinant aide matérielle et positionnement politique, Mohammed VI tente de maintenir un fragile équilibre entre diplomatie de conviction et impératifs stratégiques.