Le Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (CIRDI), basé à Washington, a ordonné au Niger, le 27 septembre, de suspendre toute vente des stocks d’uranium revendiqués par le groupe français Orano. Le tribunal a également exigé la libération d’Ibrahim Courmo, représentant de la société encore détenu à Niamey.
Cette ordonnance n’est pas une décision finale sur le fond, mais une mesure conservatoire destinée à éviter une aggravation du conflit. Orano accuse Niamey de s’être approprié indûment les stocks de la Somaïr, sa filiale locale. Les arbitres ont estimé que des mesures provisoires étaient nécessaires pour préserver les droits de l’entreprise française jusqu’à ce que le litige soit tranché.
Le bras de fer entre Orano et le Niger s’inscrit dans un contexte de tensions croissantes autour des ressources stratégiques du pays. Depuis le coup d’État de juillet 2023, les autorités militaires cherchent à redéfinir leurs relations avec leurs partenaires étrangers, en particulier la France. Orano, anciennement Areva, exploite l’uranium nigérien depuis plusieurs décennies, un secteur vital pour l’économie nationale mais aussi hautement sensible sur le plan politique.
La décision finale du CIRDI pourrait prendre des mois, voire des années. En attendant, Niamey est tenu de respecter l’ordonnance. Tout manquement pourrait entraîner des sanctions financières supplémentaires et fragiliser la position du Niger devant les arbitres. Par ailleurs, si le pays refusait d’exécuter un jugement définitif, Orano serait en droit de faire saisir à l’étranger certains actifs ou redevances dus au Niger.
Selon l’avocat parisien Mamadou Gacko, cette décision illustre la logique d’urgence qui prévaut dans certains arbitrages internationaux : empêcher qu’un litige ne s’aggrave pendant la procédure. De son côté, Maître Baptiste Rigaudeau rappelle que tout acheteur potentiel d’uranium nigérien s’exposerait désormais à de lourdes complications juridiques, ce qui constitue un avertissement indirect aux partenaires commerciaux de Niamey.
Si le Niger et Orano campent chacun sur leurs positions, des négociations pourraient s’ouvrir parallèlement à la procédure. L’affaire met en lumière la fragilité des partenariats miniers au Sahel et les risques financiers considérables pour les États qui choisissent d’affronter des multinationales sur le terrain juridique international.