Du Zimbawe à l’Éthiopie et à l’Afrique du Sud, la stratégie de l’Iran en Afrique est très offensive, un outil de lutte contre Israël.
Sur les six premiers mois de l’exercice en cours (21 mars-22 septembre), les échanges commerciaux de l’Iran avec les pays africains se sont accrus de 47,1 % en glissement annuel. L’Afrique du Sud (214,01 millions de dollars), a été le principal partenaire commercial de l’Iran (+102,92 % en valeur), suivi par le Mozambique (145,44 millions de dollars) et le Nigeria avec 194 721 tonnes (+ 162,86 % en valeur).Le 10 novembre, le ministre iranien des Affaires étrangères, Hossein Amirabdollahian, a félicité son homologue du Burkina Faso, Olivia Ragnaghnewendé Rouamba, pour sa reconduite à ce poste.
Le 8 novembre, le ministre iranien du Travail, des Coopératives et des Affaires sociales, M. Mortazavi, a qualifié le Zimbabwe d’allié stratégique de l’Iran en Afrique. M. Mortazavi a souligné que l’Iran et le Zimbabwe devraient développer des liens économiques et utiliser des capacités bilatérales.
L’aide à l’Éthiopie contre le Tigré
Le 20 octobre, le Département d’Etat des Etats Unis révélait que l’Iran avait fourni des drones de combat au gouvernement d’Ethiopie en lutte contre une rebellion dans le Tigré. Le 8 novembre, le ministère iranien des Affaires étrangères a salué un accord de cessation des hostilités entre le gouvernement fédéral éthiopien et les forces tigréennes.La liste est longue des liens commerciaux, militaires et religieux… que la République islamique d’Iran a entrepris de nouer en Afrique.
La présence iranienne en Afrique est ancienne. Cela fait plusieurs décennies que l’Iran et l’Arabie Saoudite sont en compétition religieuse sur le territoire africain. C’était à qui construira le plus de mosquées, de centres culturels (chiites ou sunnites) dans le plus grand nombre de villes africaines. Au Sénégal, la compétition entre l’Arabie Saoudite et l’Iran est particulièrement vive depuis plusieurs mois.
Ce modèle de colonisation par la religion n’a pas disparu. Mais il se redouble d’un autre, plus politique, axé sur la lutte anti-coloniale. Contrairement au président iranien Hassan Rouani qui cherchait plutôt à se rapprocher de l’Occident (Etats Unis, Europe), le président Ebrahim Raissi cherche à tisse des liens avec l’Afrique sur la base de la lutte anti-coloniale. L’Iran que l’ex-président américain Georges Bush pointait du doigt comme lié à « l’Axe du Mal », tente d’inventer un « Axe de la Résistance » contre l’impérialisme occidental.
L’aide aux Palestiniens via l’Afrique
Selon The Times of Israël, Raissi entend soutenir vigoureusement les organisations pro-palestiniennes en Afrique et se présente lui-même comme le fer de lance de la lutte contre le colonialisme israélien en Palestine. L’Iran rappelle volontiers qu’il finance et arme le Hamas et le Jihad islamique palestinien à Gaza ainsi que le Hezbollah au Liban.
Pour l’Iran, les liens noués avec les pays africains sont un moyen de contourner le boycott des Européens et des Américains, mais ils sont aussi un outil de lutte contre Israël. Ce dernier est très présent en Afrique et multiplie les partenariats économiques et technologiques dans le but de convaincre divers pays d’Afrique qu’il n’est pas un pays colonisateur et qu’il serait souhaitable de ne pas voter en masse contre lui à l’Onu et dans les organisations satellites.
L’Iran a aussi mal supporté qu’Israël soit devenu, le 22 juillet 2021, membre de l’Union africaine avec un statut d’observateur, un statut conquis de haute lutte après des années d’investissement dans la création de liens économiques et technologiques avec de nombreux pays africains.
L’Afrique du Sud, allié privilégié
C’est en Afrique du Sud que le thème de la Palestine développé par l’Iran semble faire mouche particulièrement. Début août 2022, le petit-fils de Nelson Mandela, Mandla Mandela, a reçu le prix islamique des droits de l’homme à Téhéran. « C’est merveilleux d’être en République islamique d’Iran, un pays et une nation qui ont inspiré mon grand-père alors qu’il était en prison », a-t-il déclaré. « Le succès de la révolution islamique de 1979, menée par l’imam Khomeiny, constitue l’une des plus grandes défaites de l’impérialisme moderne »
Mandla Mandela est également un farouche anti sioniste, associé à Africa4Palestine, organisation sud-africaine née du mouvement Boycott, Désinvestissement et Sanctions (BDS).
Quelques mois avant la réception de ce prix, des automobilistes de Menlyn, une banlieue de Pretoria, capitale de l’Afrique du Sud, ont découvert un étrange panneau d’affichage représentant Nelson Mandela et le défunt ayatollah Khomeiny d’Iran veillant de concert sur le Dôme du Rocher à Jérusalem.
Pour l’avenir, toute la question est de savoir si les armes iraniennes, ses drones et ses missiles hypersoniques ajoutés à ses mosquées, séduiront plus les pays d’Afrique que les technologies agricoles ou pharmaceutiques israéliennes.