Ce jeudi, les autorités algériennes ont renvoyé vers la France deux ressortissants expulsés du territoire français. Âgés de 30 et 41 ans, ces deux hommes avaient été précédemment condamnés en France pour des faits de troubles à l’ordre public. Mais une fois arrivés à Alger, ils ont été refoulés, la raison invoquée étant l’absence de laissez-passer consulaires. Une décision qui met en lumière la tension croissante entre la France et l’Algérie autour des expulsions et des obligations de quitter le territoire (OQTF).
Les deux Algériens concernés par cet incident sont Abdelkadir B., récemment sorti de prison, et Nasr Eddine K., né en 1994 et connu pour ses troubles à l’ordre public. Bien que la France les ait expulsés en raison de leur statut de « ressortissants dangereux » et de leur interdiction de retour, Alger a décidé de les refouler, faute de documents consulaires. Cette situation intervient après le refus, mercredi dernier, d’une autre personne expulsée, également renvoyée en France malgré la présentation d’un passeport algérien. La question des laissez-passer consulaires, qui conditionnent le retour des expulsés, se pose donc avec insistance.
Le contexte de cette affaire s’inscrit dans une période de vives tensions diplomatiques entre les deux pays. Depuis plusieurs mois, les relations entre l’Algérie et la France sont marquées par des divergences sur les expulsions d’individus jugés indésirables. Les autorités françaises ont mis en avant la nécessité d’un renforcement des expulsions de ressortissants jugés dangereux, tandis que l’Algérie a fait part de ses réserves, notamment concernant le manque de réciprocité dans les démarches administratives. Ces tensions se sont exacerbées après l’affaire des influenceurs algériens, accusés d’incitation à la violence contre des opposants au régime d’Alger.
Les perspectives à venir restent incertaines, notamment en ce qui concerne l’application des obligations de quitter le territoire (OQTF). Le ministre français de l’Intérieur a menacé, fin février, de « tester des mesures fermes » si l’Algérie continuait de refuser de reprendre ses ressortissants expulsés. De son côté, Alger a rejeté ces menaces, évoquant une volonté d’appliquer la réciprocité. Le président français, Emmanuel Macron, a tenté d’apaiser les tensions en insistant sur le respect des accords bilatéraux, en particulier celui de 1994, sur le retour des ressortissants avec papiers d’identité. Toutefois, l’Algérie a pointé des exagérations dans les critiques françaises, soulignant que des milliers de laissez-passer consulaires ont été délivrés en 2024.
Une analyse plus poussée de la situation révèle les complications liées aux accords bilatéraux. En particulier, l’accord de 1968 sur le séjour et l’emploi des Algériens en France est devenu un point de friction, certains plaidant pour une modernisation de ce texte. En 2022, les deux gouvernements ont envisagé de rouvrir ce dossier pour mieux l’adapter aux enjeux contemporains. Cependant, ces discussions semblent avoir peu progressé, et la situation actuelle semble marquer un retour aux tensions diplomatiques.
Le climat autour des expulsions de ressortissants indésirables demeure particulièrement tendu, alimenté par des accusations réciproques et une gestion complexe des demandes administratives. L’ancien ambassadeur d’Algérie, Abdelaziz Rahabi, a dénoncé un traitement excessif de cette crise, en rappelant que l’Algérie a délivré près de 3 000 laissez-passer consulaires en 2024, avec un taux de satisfaction de la demande française d’environ 43 %. Ce chiffre met en lumière les limites de la coopération bilatérale, tout en soulignant que la question des expulsions reste au cœur des relations entre les deux pays.