Au sein de la société civile africaine, des voix critiques se font entendre. Le président gabonais Marc Ona Essangui, qui dirige l’organisation Tournons la page internationale, estime que les chefs d’État qui ont mené cette mission sont trop polarisants et que l’Afrique dispose d’instances habilitées à mener des médiations.
Selon lui, la médiation africaine en Ukraine et en Russie est un échec diplomatique. Il souligne que les présidents Zelensky et Poutine ont rejeté cette médiation et que les médiateurs choisis n’étaient pas adéquats. Il affirme que si l’Afrique souhaite envoyer une médiation, il est préférable que ce soit les voix de l’Union africaine qui se fassent entendre, car elles sont impartiales. Il estime que la présence de personnalités qui sont déjà considérées comme des ennemis de la démocratie et qui sont déjà affiliées à la Russie ou à l’Ukraine fausse l’objectivité de la médiation.
Cependant, la chercheuse Liesl Louw, conseillère principale au sein de l’ISS International Crisis Group, n’est pas tout à fait d’accord. Selon elle, cette mission n’est pas un échec, mais plutôt un premier pas vers une résolution pacifique du conflit. Elle souligne néanmoins que les dissensions diplomatiques entre les États africains constituent un obstacle à ce type de médiation.
Elle fait remarquer qu’il y avait des divergences au sein de la délégation africaine. Les présidents Sall et Assoumani ont parlé de premier pas et de bonne volonté, tandis que le président Ramaphosa a évoqué la nécessité de désescalade des deux côtés, ce qui a irrité Zelensky et probablement aussi Poutine. Selon Louw, cette disparité de discours est une faiblesse. Elle souligne l’importance de parvenir à un consensus au sein de la délégation africaine si une prochaine mission de médiation devait être entreprise.
Le sommet Russie-Afrique qui se tiendra à Saint-Pétersbourg fin juillet sera un événement intéressant à observer. Il permettra de déterminer combien de chefs d’État africains seront présents. Si la majorité des chefs d’État des 54 pays africains se rendent en Russie, cela pourrait être considéré comme une victoire pour le président Poutine.