Le média indépendant burundais Iwacu a commémoré mercredi 13 juillet le neuvième anniversaire de la disparition de son journaliste Jean Bigirimana, survenue le 22 juillet 2016. Une cérémonie de recueillement s’est tenue dans les locaux du journal, où une quinzaine de journalistes ont déposé une couronne de fleurs devant un portrait géant du disparu, peint sur les murs de l’imprimerie.
Jean Bigirimana avait disparu alors qu’il se rendait à un rendez-vous avec des agents du Service national de renseignement (SNR), à une trentaine de kilomètres de Bujumbura. Depuis cette date fatidique, aucune nouvelle du journaliste n’est parvenue à sa rédaction. La cérémonie de mercredi a été marquée par un geste symbolique fort : ce sont les plus jeunes journalistes de la rédaction qui ont porté la couronne, un message destiné à montrer que “la relève est là” et que “Jean n’a pas disparu pour rien”, selon les mots du directeur du journal.
La disparition de Jean Bigirimana s’inscrit dans la période la plus sombre de l’histoire récente du Burundi. Elle coïncide avec la crise politique déclenchée par la volonté du défunt président Pierre Nkurunziza de briguer un troisième mandat en 2015. Cette période de troubles a fait des milliers de morts selon les associations locales et contraint près de 500 000 Burundais à l’exil. La presse indépendante a particulièrement souffert de cette répression, Iwacu demeurant l’un des derniers bastions du journalisme libre dans le pays.
Neuf ans après les faits, aucune enquête sérieuse n’a été initiée par les autorités burundaises pour élucider cette disparition. Le directeur d’Iwacu a réaffirmé la détermination de son équipe à “continuer de demander justice pour Jean Bigirimana”. Cette position illustre la persistance des zones d’ombre qui entourent le sort des opposants et journalistes victimes de la répression durant la crise de 2015-2016.
L’impact de cette disparition dépasse le cadre professionnel. L’épouse de Jean Bigirimana et leurs deux enfants ont été contraints de fuir le pays et vivent désormais en exil, selon le directeur d’Iwacu. Cette situation familiale dramatique témoigne des conséquences durables de la répression sur l’entourage des victimes.
Malgré le climat d’intimidation, Iwacu continue ses activités journalistiques, incarnant une forme de résistance professionnelle. “La peur au ventre, nous n’avons pas lâché. Nous avons continué notre travail”, a déclaré le directeur lors de la cérémonie. Cette persévérance fait du cas Jean Bigirimana un symbole de la lutte pour la liberté de la presse au Burundi, où les médias indépendants demeurent sous pression constante.