Les exportations africaines de café ont franchi pour la première fois le cap symbolique du million de tonnes lors de la saison 2024/2025, atteignant 1,18 million de tonnes. Ce niveau constitue un record historique et représente une progression annuelle spectaculaire de 18,6 %, selon les dernières données publiées par l’Organisation internationale du café (ICO).
Cette performance exceptionnelle est principalement tirée par deux géants est-africains. L’Ouganda et l’Éthiopie, avec respectivement 495 600 et 442 200 tonnes exportées, contribuent à eux seuls à près de 80% du total continental. L’ICO explique ce bond par une conjonction de facteurs : des récoltes abondantes dans les principaux bassins de production, la libération de stocks plus importants que d’habitude et, surtout, le maintien de prix internationaux à des niveaux extrêmement élevés, qui ont stimulé les ventes.
Cette croissance africaine survient dans un marché mondial en léger recul, les exportations globales ayant baissé de 0,3%. Le continent contraste ainsi avec la tendance, notamment portée à la baisse par l’Amérique du Sud. Malgré ce record, la part de l’Afrique dans le commerce mondial du café reste modeste, à 11,6% des expéditions. Cette percée s’inscrit dans une dynamique plus longue de regain d’intérêt pour la filière café sur le continent, longtemps confrontée à des défis de productivité, de transformation locale et de valeur ajoutée captée.
Les producteurs africains affichent des ambitions claires pour capitaliser sur cette dynamique. Lors du 3e sommet du G25 africain du café en février 2025 à Dar es-Salaam, un engagement collectif a été pris : porter la part du continent à 20% de la production mondiale d’ici 2030. Des plans nationaux agressifs accompagnent cet objectif, comme en Tanzanie qui vise à quadrupler sa production, ou au Kenya qui prévoit de tripler la sienne et a lancé une digitalisation de ses ventes aux enchères pour plus de transparence et d’efficacité.
Le contexte de prix a été un puissant catalyseur. L’indice des cours de l’arabica à New York (ICE) a clôturé la saison avec une hausse de 51% sur un an, à 8,26 dollars le kilo. Cette envolée, liée à des inquiétudes sur l’offre mondiale et à la spéculation, a rendu les exportations particulièrement rentables. Toutefois, cette dépendance aux cours mondiaux, volatils par nature, rappelle la vulnérabilité structurelle des économies caféières africaines. La question de savoir si une partie de ces revenus exceptionnels sera réinvestie dans la résilience des plantations, la recherche ou la transformation locale sera cruciale pour l’avenir.
Si l’Ouganda et l’Éthiopie dominent le paysage, l’attention se porte aussi sur la capacité des autres producteurs à suivre le mouvement. Les initiatives comme la stratégie tanzanienne ou la réforme kényane montrent une volonté politique renouvelée. Le défi sera de transformer cette volonté en résultats durables, en améliorant les rendements souvent bas, en luttant contre les effets du changement climatique sur les cultures, et en développant des marques continentales fortes pour capter davantage de valeur en aval de la chaîne, au-delà de l’exportation de la fève brute.



