Maurice Kamto sera bien candidat à la présidentielle camerounaise de 2025. Mais c’est sous une bannière inattendue qu’il se présente : celle du Manidem (Mouvement africain pour la nouvelle indépendance et la démocratie), un petit parti de gauche radicale dirigé par Anicet Ekane. Ce choix, officialisé lors d’une conférence de presse à Yaoundé, scelle une alliance politique nouvelle, conclue avec le soutien de l’APC (Alliance politique pour le changement), coordonnée par le député Jean-Michel Nitcheu.
Face à la presse, les trois figures de cette entente — Kamto, Ekane et Nitcheu — ont tenu à clarifier les motivations de ce rapprochement. « L’accord entre le professeur Kamto et le Manidem ne repose sur aucune transaction financière », a insisté Nitcheu, balayant d’éventuelles suspicions de marchandage politique. Pour Ekane, ce ralliement répond à une urgence nationale. Il a dénoncé « la corruption, le pillage économique et l’abrutissement moral » comme autant de maux justifiant l’investiture de Kamto, perçu comme le mieux à même de porter une alternative crédible.
Le ralliement de Kamto au Manidem n’est pas symbolique : il implique une rupture formelle avec son propre parti, le MRC, dont il a démissionné le 25 juin. Deux jours plus tard, il intégrait officiellement les rangs du Manidem. Une décision lourde de sens, qui signale non seulement un changement de stratégie, mais aussi une volonté de contourner les blocages internes au sein de l’opposition, où les candidatures multiples ont historiquement affaibli les chances de victoire.
L’annonce de cette candidature redistribue les cartes à quelques mois du scrutin. Elle met fin aux spéculations sur la posture électorale de Kamto, tout en interrogeant la capacité du Manidem à mobiliser au-delà de son socle militant. Cette alliance pourrait-elle initier un front commun plus large de l’opposition face au RDPC ? Rien n’est moins sûr, tant les désaccords subsistent parmi les autres leaders politiques, souvent plus préoccupés par leur ancrage régional que par une dynamique nationale unitaire.
En se présentant sous les couleurs d’un autre parti, Kamto prend un risque stratégique, mais vise un effet double : contourner les contraintes judiciaires ou administratives qui pèsent sur le MRC, tout en apparaissant comme un homme de consensus. L’hommage qu’il a rendu au Manidem et à son président illustre une volonté d’apaisement et de reconnaissance, mais ne garantit pas pour autant un transfert automatique de la popularité dont il jouissait en tant que figure centrale du MRC.
Au-delà de la candidature elle-même, cet épisode pourrait marquer le début d’une recomposition plus profonde de l’opposition camerounaise. Le Manidem, longtemps en marge, bénéficie d’une visibilité inédite. Quant à l’APC, son rôle d’intermédiaire dans cette alliance renforce sa crédibilité. Mais seule une campagne coordonnée, structurée et cohérente pourra transformer cette coalition de circonstances en une force électorale viable.